Congo : le plan national de développement au crible de l’intelligence économique

[Africa Diligence] Le plan d’action des autorités congolaises pour la diversification de l’économie figure parmi les trois axes prioritaires du Plan national de développement (PND) 2018-2022, dont le coût total est estimé à 15 510 Mds FCFA. Ce que révèle la grille de lecture de l’intelligence économique.

 Outre l’axe de la diversification, ce plan concentrera ses efforts sur la gouvernance, pour améliorer l’action gouvernementale et renforcer la gestion des deniers publics, et le capital humain, par la réforme du système éducatif et de la formation qualifiante et professionnelle. Ces trois axes stratégiques sont complémentaires et s’inscrivent dans la volonté de l’État congolais de favoriser l’émergence du pays.

 Les secteurs de l’agriculture et du tourisme ont été mis au centre du programme de diversification. Il s’agit pour le secteur agricole, au travers du Projet de développement d’agriculture commerciale (PDAC) que la Banque mondiale finance à hauteur de 100 M USD, de renforcer la sécurité alimentaire (notamment sur les filières manioc, banane et cacao) et l’inclusion économique des populations vivant dans des zones reculées. Pour le tourisme, l’accent est mis sur la valorisation et la richesse du patrimoine naturel et culturel du pays. Malgré leur potentiel non négligeable, ils n’ont représenté respectivement que 5,3 % et environ 1 % du PIB congolais en 2018.

L’objectif visé par le gouvernement est de faire en sorte que le tourisme, secteur émergent dans l’économie du Congo, représente 10 % du PIB congolais. Mais il est en réalité difficile d’évaluer son poids réel dans l’économie nationale.5 Le plan d’action du gouvernement prévoit un remaniement de l’administration en charge du tourisme et la modernisation du cadre légal, la formation des professionnels du secteur, la mise au point des infrastructures, ainsi qu’un travail de communication sur l’attractivité et la lisibilité de l’offre touristique. Dans le cadre de cette stratégie, deux Bureaux d’informations touristiques (BIT) ont été ouverts en 2016 à l’aéroport Maya-Maya de Brazzaville et le site internet de l’office national du tourisme lancé en 2017. Des initiatives privées concourent également à la promotion du secteur, à l’instar du portail « visiterlecongo » réalisé par des Congolais de la diaspora ou « Africa City Guide », lancé par des professionnels anglais et qui vient de répertorier la destination Brazzaville. L’État congolais veut s’inspirer du modèle marocain du tourisme durable réussi. Le pays fait partie des 26 pays africains ayant signé le 10 novembre 2016 à Marrakech, la Charte Africaine du tourisme durable et responsable, en s’engageant à développer un tourisme qui tienne compte des impacts économiques, sociaux et environnementaux.

Mais de nombreux obstacles subsistent : le manque d’infrastructures routières pour desservir les zones rurales enclavées où sont localisés les parcs nationaux et plusieurs sites emblématiques, et d’infrastructures hôtelières hors des centres urbains, la difficulté d’obtention de visa d’entrée au Congo, le coût des transports élevés en raison de l’enclavement de certains sites et la rareté des moyens de transport permettant d’y accéder. À ces difficultés logistiques s’ajoute le manque de financement pour développer le secteur. En effet, le budget de l’État 2019 ne prévoit qu’une enveloppe d’1,5 Md FCFA pour les investissements publics dans les secteurs du tourisme et de l’environnement (soit 0,5 % des dépenses globales d’investissement), sous tutelle du même ministère. Il est par conséquent difficile d’espérer un décollage à court terme du secteur avec les moyens insuffisants dont dispose l’État.

En outre l’appel aux investissements privés dans le secteur du tourisme en particulier et dans les secteurs diversifiés de manière générale butte en outre sur le climat des affaires en République du Congo. Le Congo-Brazzaville occupe désormais la 180ème place sur 190 au classement Doing Business de la Banque mondiale, soit une perte de trois places par rapport à 2017.

Un rapport de la Banque Mondiale, datant de 2015, examinant la diversification de l’économie congolaise promise par le précédent PND, faisait déjà état de conclusions inquiétantes : le Congo n’a pas connu d’évolution significative en termes de diversification de 2012 à 2015. L’institution financière donnait à cette absence de résultats probants plusieurs raisons : le maintien de la part du secteur pétrolier dans l’économie congolaise, le manque d’un leadership puissant du gouvernement, l’inefficacité de l’administration publique, peu disposée à se concentrer sur les projets de diversification, l’absence de structure adéquate pour le financement de la mise en œuvre du PND.

La Rédaction (avec LAC et Knowdys Database)