Villes émergentes, villes polluées : quel impact sur l’économie ?

[Africa Diligence] La pollution de l’air est devenue un problème sanitaire majeur pour les villes des pays émergents et en développement. De Dakar asphyxié, au Caire obscurci en passant par un Pékin hors contrôle, l’impact économique se traduit par une perte de croissance et d’attractivité.

Etat de péril sanitaire majeur dans les jeunes mégapoles de la planète ! Les villes champignons d’Asie, d’Inde et d’Afrique étouffent. A Pékin (20 millions d’habitants), le niveau de pollution atmosphérique a depuis longtemps explosé les seuils admis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Et le pire est toujours possible. Les urgences des hôpitaux de la capitale chinoise viennent de vivre un véritable « janvier noir ». Grand comme deux fois la France, le « smog » qui a piégé l’agglomération de Pékin et celles d’autres grandes villes « multimillionnaires » de l’est du pays a déclenché une flambée (+ 20 %) des affections respiratoires.

Des épisodes de pollution d’une intensité que ni Delhi (20 millions d’habitants) ni Le Caire (17 millions), Karachi (20 millions), Oulan-Bator (1,2 million) ou Dakar (3 millions d’habitants) n’ont encore connue. Pour autant, il ne fait pas bon y respirer à l’année. Ces villes, des « mégacités » pour la plupart, comptent parmi les plus polluées du monde au sein du classement établi en 2011 par l’OMS sur la base du taux annuel de particules M10 dans l’air, celles émises par l’industrie, le trafic routier et le chauffage.

Un lourd tribut au développement

Les petites villes n’échappent pas à la malédiction : de nombreuses municipalités en Iran – Ahwaz est en tête du classement -, au Bangladesh, au Pakistan, en Chine, en Inde, en Arabie saoudite ou encore en Turquie occupent les 50 premières places des villes où la qualité de l’air s’est considérablement détériorée.

Une évolution à rebours de ce que l’on observe dans les grandes métropoles des pays riches. Depuis près de deux décennies, les émissions de polluants y sont stables.

Dans les grandes villes d’Europe et d’Amérique du Nord, la dégradation de l’air reste la cause de morts prématurées nombreuses, mais pas dans les proportions observées au Caire et à Alexandrie, où ces décès accélérés se comptent par dizaines de milliers. Dans l’ex-empire du Milieu, le bilan s’établit à plusieurs centaines de milliers de victimes. Pékin paye un très lourd tribut à plusieurs décennies de croissance et de production industrielle effrénées. De gros efforts y ont pourtant été entrepris pour réduire la pollution. Avant les Jeux olympiques, beaucoup d’usines ont été fermées et déménagées hors les murs. Mais ces mesures coûteuses n’ont pas eu l’effet attendu. Aujourd’hui, Pékin est asphyxiée par les gaz d’un parc automobile tentaculaire. Un problème qui s’ajoute à celui du coût de la vie, de plus en plus élevé. Le régime devient fébrile face à une population qui s’exaspère de la situation. Et la capitale chinoise pourrait devenir moins attractive aux yeux des étrangers. Les sociétés internationales risquent d’avoir plus de difficultés à y envoyer des cadres prêts à partir avec femme et enfants. Même si cette pollution peut servir la volonté du régime d’accélérer la sinisation des filiales des groupes étrangers.

Infrastructures de transports en retard

La Chine n’a pas fini d’investir massivement pour purifier son air, ce qui peut être un facteur de croissance. « Il faut dépasser les enjeux de PIB. Tous ces investissements contraints enlèvent de la marge de manœuvre, de la liberté d’entreprendre. La vraie question, c’est la croissance durable. La Chine se la pose comme l’Occident », selon Joël Ruet, chercheur associé à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). « Les Etats-Unis ont mis cinquante ans à redescendre sous les seuils de pollution. La Chine ne mettra pas autant de temps », estime un expert de la Banque mondiale.

Pas sûr que Delhi, ville submergée par les voitures, se soit mise sur la même trajectoire. La qualité de l’air y est encore considérée comme « normale » par les autorités. Les investissements dans les infrastructures de transports collectifs sont très en retard et aucune mesure d’urgence n’est prévue lors des pics de pollution, sinon de déconseiller la pratique de sports d’extérieur. Quant à l’impact des problèmes environnementaux sur la vie économique, il n’est, pour l’instant, pas ressenti. Quand un investisseur renonce à venir à Delhi, c’est d’abord à cause du climat de corruption qui y règne.

Les mégapoles des pays en développement risquent d’être les perdantes de l’affaire. La Banque mondiale chiffrait en 2002 à deux points de PIB l’impact économique de la pollution de l’air au Caire. Une mise en garde restée lettre morte. « Il n’y a pas eu de volonté politique de s’attaquer à une situation surmontable », observe un expert.

(Avec Joël COSSARDEAUX)

Cet article a 0 commentaires

  1. mutuelle dermatologue

    Bonjour,
    Qui sait? La pollution de l’air fait peut être partie de la cause de la crise économique actuelle car il parait que plus l’air atmosphérique d’un pays est pollué plus cela lui cause des pertes financières et économiques considérables. On ne peut même savoir les dommages sanitaires.

Laisser un commentaire