Oui à la réintégration de Madagascar au sein de l’AGOA

(Africa Diligence) Quand on vend le marché malgache à l’international, l’investisseur ordinaire pointe la précarité institutionnelle, la dépendance financière du pays, la pauvreté des 2/3 de la population et l’exposition de l’agriculture aux aléas climatiques… Les analystes en intelligence économique de Knowdys y voient aussi un formidable potentiel qui ne demande qu’à être boosté par des instruments tels que l’AGOA.

Mardi 18 mars 2014, le président Hery Rajaonarimampianina,  était à Washington, D.C. pour y rencontrer de hauts responsables de l’administration Obama, ainsi que les présidences du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale. Les retombées de cette visite devraient prochainement marquer la fin de quatre années de sanctions économiques, durant lesquelles la communauté des donateurs a gelé l’ensemble de son aide – à l’exception de l’assistance d’urgence – à une économie malgache sous perfusion financière internationale.

D’un point de vue diplomatique, le simple fait que ces rencontres aient lieu représente une avancée majeure pour les nouvelles autorités. Le projet présidentiel de remettre l’économie malgache sur la trajectoire d’une croissance durable et le rôle de la communauté international au regard de cet objectif faisaient partie des principaux sujets à l’ordre du jour.

Le président Rajaonarimampianina doit faire face à d’importants défis, le premier d’entre-eux étant un environnement politique hautement toxique. Les crises politiques successives ont laissé de profonds ressentiments, et les progrès vers la réconciliation nationale sont inégaux. Le système politique malgache a été décrit comme dysfonctionnant, et le statut quo actuel repose sur un équilibre assez instable, qui peut s’effondrer s’il n’est pas consolidé. Tout en cherchant à assurer cet équilibre nécessaire, le président devra faire face et résister à la tentation de l’attitude politique de type “le gagnant rafle et garde la mise” qui prévaut à Madagascar. Dans ce contexte,  le soutien de la communauté internationale sera crucial pour donner au président les moyens de gouverner et de présenter un plan de reprise économique.

Si le président parvient à assurer un ordre politique minimal, Madagascar apparaît comme étant à l’orée d’une forte reprise. Le pays a déjà, à de nombreuses reprises par le passé, fait la preuve de sa capacité à porter une croissance solide à court terme tout au moins. Le principal défi qui attend les décideurs politiques et leurs partenaires en développement consiste à s’assurer que l’économie, sans se contenter d’atteindre sa vitesse de croisière, se maintiendra sur ce chemin de croissance soutenue sur la durée. Plusieurs recettes existent probablement pour atteindre ce but, mais l’ingrédient le plus important est toujours le même : l’emploi. Une reprise sans emplois ne mènera pas à une prospérité partagée par la majorité des citoyens. Les Malgaches ont besoin d’emplois durables et décents pour les tirer de la pauvreté. Tant que la croissance ne sera pas inclusive, les risques que se reproduise le “cycle malgache” d’expansions et de ralentissements économiques restent élevés.

La levée des sanctions économiques représenterait un pas important vers un rythme de croissance élevé. Mais le plus important est peut-être le retour des investissements étrangers, en particulier les investissements directs à l’étranger (IDE). L’aide des conseils en intelligence économique de Knowdys est très attendue sur ce point. Les investisseurs souhaitent revenir dans le pays, mais ils ont besoin de signaux forts. Ils attendent stabilité politique, Etat de droit, amélioration du climat des affaires, transparence et meilleure gouvernance. Le président Rajaonarimampianina doit faire preuve de résolution et de leadership dans l’ensemble de ces domaines.

Si les IDE peuvent permettre d’atteindre un niveau de croissance plus élevé, il n’est pas acquis qu’ils permettent de créer des emplois à un niveau correspondant à celui des besoins du pays – un niveau qui rendrait la croissance plus inclusive et durable. La majeure partie de ces investissements a concerné dans le passé récent l’industrie de l’extraction (en particulier minière) qui est en général intense en capital mais dont le potentiel en créations d’emplois est malheureusement limité. Les emplois créés sont souvent hautement spécialisés et peu de Malgaches disposent des qualifications requises pour ces postes. Cette « fracture des compétences » suggère une nécessité de former plus de techniciens malgaches afin de tirer le meilleur parti de ces opportunités. Intégrer un plus grand nombre de petites et moyennes entreprises locales dans la chaîne de valeur des firmes étrangères investissant à Madagascar aiderait également à créer des emplois.

Avant la crise, une grande partie des IDE étaient focalisés sur les zones de traitement des exportations malgaches, dans le but de tirer avantage de l’accès préférentiel au marché américain permis par la loi AGOA (African Growth and Opportunity Act). Ces investissements se sont concentrés sur les secteurs manufacturiers à fort coefficient de travail (en particulier ceux du textile et du prêt-à-porter), et ont généré un grand nombre d’emplois de qualité, dont 200 000 furent malheureusement détruits suite à la suspension de l’AGOA. La fin de cette suspension a été longuement évoquée durant les rencontres entre le président Rajaonarimampianina et les décideurs américains. L’heure est venue d’accueillir le retour de Madagascar au sein de l’AGOA. Selon les experts en intelligence stratégique de Knowdys, Washington a le pouvoir d’aider de manière significative à améliorer les perspectives d’une reprise durable et inclusive à Madagascar.

(Avec Soamiely Andriamananjara)