Transformer l’agriculture africaine grâce aux TIC

[Africa Diligence] Quelques agriculteurs Africains font déjà bouger les lignes en utilisant les technologies de la téléphonie mobile pour contourner les intermédiaires qui faussent les prix sur le marché des produits agricoles. Les retours d’expérience exposés lors de la conférence sur la transformation de l’agriculture africaine (achevé la semaine dernière à Dakar), ont aussi révélé que les TIC aident à accéder à des semences de meilleure qualité.

Il apparaît ainsi clairement que les nouvelles variétés de semences et les progrès de l’agronomie, fruits de nombreuses années de recherche, peuvent se diffuser à d’autres régions d’Afrique, grâce aux technologies mobiles.

« Maintenant que nous utilisons les nouvelles technologies de la recherche pour améliorer le rendement de la production agricole, il nous faut trouver le moyen de commercialiser nos récoltes et de maîtriser les chaînes de valeur agricoles », a insisté Akinwumi Adesina, le président de la Banque africaine de développement (BAD),

Dans un nouvel effort pour associer les technologies agricoles aux chaînes de commercialisation, la BAD a annoncé qu’elle mettrait en place une facilité de financement, à hauteur de 300 millions de dollars EU, destinée à aider les femmes exploitantes agricoles à utiliser davantage les technologies existantes, afin d’augmenter le rendement de leurs récoltes et ainsi stimuler une croissance rapide du secteur agricole.

« Nous devons veiller à ce que les prêts que nous octroyons aux banques aient un impact en terme de développement sur le secteur agricole », a souligné M. Adesina, lors d’un atelier en marge de la conférence «Nourrir l’Afrique».

Du temps où il était ministre de l’Agriculture du Nigeria, Akinwumi Adesina avait lancé un programme d’appui au développement de la croissance (Growth Enhancement Support Scheme – GES), qui a contribué à supprimer les intermédiaires mercantiles, et à augmenter la production alimentaire de plus de neuf millions de tonnes métriques en un an. Il avait également mis en place un système de portefeuille électronique, grâce auquel les petits exploitants agricoles reçoivent des bons électroniques pour des semences et des engrais subventionnés, directement sur leurs téléphones portables ; ils peuvent ainsi les échanger contre des intrants agricoles auprès des fournisseurs du secteur privé.

Près de 6 millions d’agriculteurs ont utilisé ce mécanisme, qui a permis à d’améliorer la sécurité alimentaire de 30 millions de personnes vivant dans des fermes en zone rurale. Il a également permis aux femmes exploitantes agricoles, auparavant marginalisées dans l’ancien système de distribution d’engrais, d’obtenir de meilleurs rendements grâce à l’utilisation des intrants agricoles subventionnés, auxquels elles ont accès par via leur téléphone portable.

Afin d’illustrer les obstacles que rencontrent les startups dans le secteur agro-alimentaire en Afrique, Temi Aroge, un ancien médecin nigérian reconverti dans l’agro-alimentaire, a cité les difficultés liées à l’obtention des titres de propriété pour les terres et des garanties exigées par les banques commerciales pour obtenir un prêt –contraintes majeures à la commercialisation de produits agricoles selon lui.

« Les capitaux se dirigent vers le secteur pétrolier, et les banques de développement, qui exigent des garanties de la part des banques commerciales avant d’accorder des prêts aux entreprises du secteur agro-alimentaire, ne sont pas disposées à offrir un financement en l’absence de telles garanties », a déploré Temi Aroge, qui dirige une grande entreprise de transformation du manioc.

La conférence est axée sur le développement de nouvelles politiques visant à transformer l’agriculture africaine, pour en faire une activité commerciale lucrative pour la production alimentaire de masse destinée à la consommation locale et à l’exportation.

Au total, ce sont plus de 400 délégués et spécialistes du monde entier qui ont ainsi débattu de la façon de donner une valeur ajoutée aux matières premières du continent, en particulier aux cultures dites marchandes telles que le thé, le café, le cacao et le coton. Entre autres objectif : les transformer en produits finis à destination des marchés locaux et d’exportation.

La Rédaction (avec Abdou Timera)