Edwige Neshama Sossah : l’écrivaine Ivoirienne promeut l’émergence par la coopération

[Africa Diligence] En 2000, elle a assisté à la signature des Accords de Cotonou. Ancienne de l’Ambassade de Côte d’Ivoire à Bruxelles, Edwige Neshama Sossah est une experte des questions liées aux relations entre l’Union Européenne et les pays ACP. Diplômée de l’Institut d’études des relations internationales (ILERI) de Paris et auteur de trois livres, l’Ivoirienne rejette l’autarcie et milite pour une émergence par le partenariat Nord-Sud.

Edwige Neshama Sossah commence sa carrière à l’ambassade de Côte d’Ivoire à Bruxelles où elle exercé entre 1998 et 2000. De la chancellerie, elle a l’opportunité de suivre toutes les négociations qui suivent les accords de Lomé et d’assister non seulement au Sommet des chefs d’États et de gouvernements à Saint Domingue en 1999 mais aussi de participer à la signature de l’Accord de Cotonou au Bénin en juin 2000. Après l’ambassade, elle décide de mettre ses idées au profit du parti Le mouvement réformateur. « Je suis libérale avec tout le beau côté humaniste du côté libéral » confie cette Belgo-Ivoirienne qui vit entre Paris et Bruxelles.

Parallèlement à ses activités politiques, Edwige Neshama Sossah est une écrivaine engagée. Son premier livre Vers une nouvelle stratégie politique, qu’elle a pris le soin d’éditer à compte d’auteur, soulève la question d’une nouvelle approche en matière de coopération Sud-Nord mais surtout d’une responsabilisation de l’Afrique. Son second livre Stratégies gagnantes de coopération Afrique-Europe va dans le même sens. L’écriture est assurément sa grande passion. Elle s’y investit corps et âme et ne lésine sur aucun moyen pour promouvoir ses idées, y compris à s’autoéditer. Pour son troisième livre L’Afrique est le devenir de l’Occident, elle a choisi de déléguer cet effort et recherche activement un « bon éditeur » selon ses termes. « Malgré les sollicitations de maisons telles que l’Harmattan, je souhaite faire jouer la concurrence afin de privilégier le meilleur » avoue malicieusement celle qui est par ailleurs Chargée de communication et relations publiques pour l’association « Africa femmes performantes. » C’est avec détermination, qu’elle travaille à montrer tous les aspects positifs de l’Afrique émergente.

À travers son œuvre, l’auteure Ivoirienne cherche notamment à démontrer que l’Afrique et l’Europe ont des intérêts communs et qu’elles s’en sortiront ensemble ou sombreront ensemble. Bien qu’elle le dise sur les plateaux télévision d’Afrique et d’Europe, elle ne compte pas s’arrêter à l’incantation. Son troisième livre est là pour le confirmer. Elle entend concrètement voyager dans plusieurs pays d’Afrique et d’Europe pour démontrer l’interdépendance qui existe entre ces deux continents. Parce que « les chiffres de la croissance ne se mangent pas », affirme cette promotrice des partenariats win-win qui a accepté de répondre à nos questions.

Africa Diligence : Croyez-vous en l’émergence économique du continent africain ?

Edwige Neshama Sossah : Je dirai que me poser la question c’est y répondre. Car si je ne croyais pas en l’émergence de ce beau continent, je n’aurai pas écrit presque trois livres dans ce sens. L’Afrique a tout : le potentiel humain et les ressources. Cette émergence est conditionnée cependant. Il nous faut une émergence politique c’est-à-dire une bonne gouvernance. Nos dirigeants doivent arriver à une maturité politique leur permettant de faire passer l’intérêt général en premier. Il faut donc une prise de conscience du bien public de la nation. Il faut cette conscience nationale qui minimise le lien tribal et clanique. Si on a donc une bonne gouvernance il n’y a pas de raisons que l’Afrique n’émerge pas au niveau économique. La mauvaise gouvernance est un facteur retardataire d’une quelconque émergence économique. C’est d’ailleurs ce que je martèle dans mes livres et je le dis à qui veut non seulement bien le lire mais l’entendre.

S’il fallait vous aider à contribuer au développement rapide de l’Afrique, quels leviers pourrait-on activer ?

Les leviers sont à tous les niveaux : politique, social, économique, culturel. Il nous faut développer le goût du travail. Je mettrai donc l’accent sur le goût du travail et de l’excellence. Je mettrais en place des mécanismes pour que désormais tout se mérite et que plus rien ne se donne. Nous devons nous-mêmes apprendre à pêcher. Et puis je mettrai en avant la femme africaine comme moteur du développement. Je mettrai l’accent sur l’éducation nationale facteur important pour un pays. Apprendre aux enfants le goût de l’effort, leur donner dès le bas âge l’envie d’apprendre, de lire. Je m’activerai pour faire de la lecture une véritable culture. J’activerai donc le côté économique, social, politique en même temps car tout est lié. C’est un tout. On ne peut en effet se pencher que sur l’économique et négliger le social et inversement. Je crois beaucoup en la femme porteuse de vie. Je créerais des centres pour les femmes enceintes afin que celles-ci puissent venir durant toute la période de gestation, histoire de porter leurs enfants dans de meilleures conditions pour mettre au monde des enfants bien disposés physiquement et psychiquement. Des études ont, en effet, démontré que tout ce que vit la mère pendant les neuf mois l’enfant le vit avec elle. On a vu des cas ou une mère, grande pianiste, donnait naissance à enfant pianiste. Idem pour des mères qui parlaient plusieurs langues étrangères. L’enfant qui naissait avait des facilités pour apprendre les langues étrangères. Il faut donner à la femme enceinte le meilleur ; des conditions optimales pour qu’elle puisse bien vivre ces neuf mois dans l’harmonie et la paix et mettre au monde des êtres de qualité. Pour cela je créerais donc un grand département qui se rattacherait au ministère de l’éducation nationale.

Si vous vous retrouviez à la tête de votre pays, dans les 24 heures, quelles seraient vos trois premières décisions ?

Si l’opportunité m’était donnée d’être à la tête de mon pays, je ferai d’abord un sérieux état des lieux. Car la précipitation ne garantit pas toujours l’atteinte de résultats probants. Après cela, les trois premières grandes décisions seraient de :

  • créer des conditions optimales pour faire venir un maximum d’investisseurs privés. Car l’économie est importante et pour moi elle doit être au service du politique ;
  • renflouer le budget de l’éducation nationale car l’avenir de la jeunesse est pour moi une priorité ;
  • et enfin, lutter contre la corruption.

Que pensez-vous de l’avènement du Centre Africain de Veille et d’Intelligence Économique ? 

À ma connaissance, ce Centre a vocation à rassembler, former et représenter les experts du continent. On attendait ce genre d’initiative depuis longtemps. Maintenant c’est chose faite. L’intelligence économique est un facteur très important et l’Afrique doit compter avec. Cette capacité à comprendre le présent pour envisager l’avenir, s’y préparer et anticiper tout en identifiant les risques immatériels. Telle est ma définition de l’intelligence économique.

Propos recueillis par la Rédaction

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