Espoir Dossah : l’intelligence économique béninoise doit vaincre la naïveté  

[Africa Diligence] Pour cet expert béninois, les urgences de l’intelligence économique (IE) au Bénin, entre 2020 et 2025, sont : la sensibilisation des acteurs de développement, la formation de tous les salariés des entreprises importantes à la valeur de l’information et aux outils d’IE. Selon lui, l’ensemble des acteurs locaux est atteint par une sorte de naïveté contagieuse que le CAVIE peut méthodiquement contribuer à vaincre.

La Rédaction : Vu du Bénin, quelles devraient être les priorités de l’intelligence économique entre 2020 et 2025?

Espoir M Dossah : Nous avons deux épineux problèmes : le premier est lié à la qualité des enseignements et des formations dans nos universités et écoles, j’ajouterais même des cabinets de formation, ce qui entraîne, ce que j’appelle de la naïveté professionnelle et de l’angélisme en affaires. Nos entreprises, nos dirigeants et nos cadres ne sont pas assez conscients de la valeur économique et stratégique de l’information aujourd’hui. Combien d’affaires perd-on par défaut d’informations justes, vraies et actilisées ? Le second problème, en lien direct avec le premier : c’est la négligence presque contagieuse de plusieurs dirigeants d’entreprises et des cadres de nos ministères des questions de sécurité et de protection de leur patrimoine informationnel, qu’il soit intellectuel, économique ou technologique. Nous sommes presque tous atteints de cette naïveté. Comment expliquer et démontrer que nous sommes à l’ère de l’information et que c’est quasiment la seule matière première à protéger aujourd’hui ? Savez-vous que des groupes de jeunes hackers d’un pays asiatique ont ciblé des entreprises africaines, dont ils aspirent des informations de haute valeur ajoutée sans coup férir ? Plusieurs sites de ces entreprises peuvent simplement disparaître aujourd’hui. Selon votre activité, on peut vous détruire juste avec votre site internet. Pour moi les priorités de l’intelligence économique entre 2020 et 2025 sont la sensibilisation des acteurs de développement, la formation de tous les salariés des entreprises importantes à la valeur de l’information et aux outils d’IE.

Quelles sont les premières mesures concrètes à prendre pour ‎traiter efficacement ces priorités ?

Les divers ministères de l’enseignement devraient imposer l’IE à tous les niveaux. Personnellement, je ne parle plus souvent de l’intelligence économique, mais plus de l’information et de sa valeur stratégique et économique. Il faut démythifier la notion. Les chambres de commerce de plusieurs pays doivent être plus dynamiques et sensibilisées à l’IE. Il faut multiplier les bonnes pratiques de l’IE avec des événements comme le SAPAQ.

Nous remarquons que beaucoup de jeunes de notre pays perdent du temps, de l’énergie et de l’argent pour travailler sur des projets déjà déployés dans d’autres pays pour la simple raison qu’en amont aucune stratégie de collecte d’information et de veille technologique ou concurrentielle n’a été mise en place. Nous travaillons sur le sujet et allons déployer un outil que nous avons nommé « outils de veille entrepreneuriale ».

Quel rôle le CAVIE devrait-il jouer dans cette équation aux niveaux national et international ?

 Pour nous, le CAVIE est, et doit rester un accélérateur et un facilitateur des affaires en Afrique. Avec sa notoriété, le CAVIE déblaie le terrain et permet à l’écosystème des affaires en Afrique de pouvoir parler le même langage et utiliser des éléments de langage centrés sur l’information et l’intelligence économique.

 Retrouvez l’intégralité de cet article dans la version papier d’Africa Diligence, N°0004 de Novembre 2019

Espoir Dossah est expert en Intelligence économique et Business Development. Dirigeant du cabinet NextAfrik SARL et promoteur du média panafricain Inafrik, il est un apôtre de l’émergence de l’Afrique par l’information et la formation. Titulaire d’un Diplôme européen en Intelligence économique et stratégique de l’Université de Lille 2 et de l’Ecole Supérieure des Affaires de Lille, et d’un MBA de Paris Graduate School of Management, il a accompagné plusieurs entreprises européennes dans leur développement en Afrique de l’Ouest.

Interview réalisée par la Rédaction