Monde : les sociétés des pays émergents à l’assaut des marchés obligataires

[Africa Diligence] Le crédit bancaire reste encore la source de financement privilégiée des entreprises. Les marchés obligataires peuvent, en effet, leur servir de « roue de secours » durant les phases de contraction du crédit bancaire. Mais ce n’est pas vrai lors des crises majeures. Une analyse que confirme le Centre africain de veille et d’intelligence économique (CAVIE).

Le marché obligataire peut-il compenser la baisse du crédit bancaire ? Ce n’est toujours garanti, d’après une étude récente réalisée par le groupe Coface qui a analysé la situation des entreprises des pays émergents depuis 2008. Il apparaît tout d’abord que le crédit bancaire, notamment celui accordé par les banques domestiques, reste encore la source de financement privilégiée des entreprises dans les pays émergents étudiés. Toutefois, le marché obligataire s’est développé : la part des obligations dans la dette des entreprises est passée de 14 % en 2008 à 20 % en 2016. « Cette diversification de l’offre de financement permet une baisse de son coût, augmente la capacité de prêt aux plus petites entreprises et, enfin, favorise l’investissement », note la Coface qui juge que les marchés obligataires apparaissent de plus en plus comme des « roues de secours », dans les périodes de contraction du crédit bancaire (crise de 2008-2009, puis 2015 et 2016) pour les entreprises des pays émergents. En dehors, toutefois, des « périodes de choc extrêmement violent ».

D’après les analystes de Coface, deux pays sortent du lot : la Chine et l’Inde, qui n’ont connu aucune contraction du crédit bancaire, ne permettant donc pas d’analyser un quelconque effet « roue de secours ».

Parmi les autres, ils distinguent trois groupes de pays émergents. Ceux pour lesquels le marché obligataire domestique a vraiment joué son rôle de « roue de secours » : Thaïlande, Indonésie, Pologne, République tchèque, Hongrie, Argentine. « La croissance du marché obligataire n’a pas été négative lorsque le crédit bancaire a baissé, la croissance des émissions obligataires a été plus rapide et la part des encours mis sur le marché domestique est majoritaire (plus de 60 % pour la République tchèque et 86 % pour la Thaïlande) », notent les analystes.

Dans un second groupe de pays, les moindres financements bancaires ont pu être compensés par les entreprises via des émissions obligataires sur les marchés internationaux. C’est le cas du Chili, de la Colombie, du Mexique, ou de la Turquie. « Dans ces pays, ce sont surtout les émissions obligataires sur les marchés internationaux qui ont été utilisées, avec les risques induits (risque de change accru dans le cas d’émissions en devise étrangère) », indique Coface.

Enfin, les entreprises situées en Afrique du Sud, au Brésil, en Malaisie, en Russie, se sont retrouvées dans une impasse, sans « aucune alternative au crédit bancaire », d’après Coface qui souligne que « alors que la baisse du cours des matières premières s’est traduite dans ces grands pays émergents par une contraction de l’activité, l’emprunt obligataire des entreprises a conservé une dynamique pro-cyclique et la demande d’obligations des investisseurs a baissé ». Il apparaît ainsi que « le marché obligataire n’est d’aucun secours lorsque le choc économique est particulièrement violent, malgré l’existence de marchés liquides et de relativement grande taille ».

Cécile Desjardins (avec CAVIE-ACCI)