Les cours internationaux des matières premières africaines ont bu la tasse

[Africa Diligence] Entre mi-2014 et janvier 2016, le pétrole a perdu plus de 70 % de sa valeur, atteignant un plancher qu’il n’avait plus connu depuis 13 ans et 30 % en deçà du plus bas atteint pendant la récession mondiale de 2008/09. Cette chute qui a fait boire la tasse aux Africains s’explique avant tout par une offre mondiale excédentaire.

L’érosion des cours des produits de base, entamée en 2013, s’est nettement aggravée au second semestre 2014 – une tendance qui s’est poursuivie tout au long de l’année 2015 et au début de 2016.

Avec l’arrivée de nouveaux fournisseurs sur le marché, la demande ne suit pas, d’autant plus que la croissance dans les pays industriels et émergents, y compris en Chine, a ralenti. Ce fléchissement de la demande en Chine et ailleurs a également ramené les cours du cuivre à leur niveau le plus faible depuis plus de sept ans. Les cours des autres produits de base (minerai de fer et or) et les prix à l’exportation de certains produits agricoles (notamment le coton) ont eux aussi baissé, même si les cours de l’or se sont récemment redressés. La baisse des cours du café a été plus modérée tandis que les prix du cacao sont restés soutenus en 2015.

Les perspectives économiques présentées dans ce rapport reposent sur l’hypothèse d’une stabilisation des cours du pétrole et des autres produits de base puis d’une lente reprise. Mais vu les niveaux actuels, en 2016 les prix resteront inférieurs en moyenne à ceux de 2015 et ne commenceront à se redresser qu’en 2017. En tablant sur un prix moyen du baril de pétrole à 37 USD en 2016 et 48 USD en 2017, les cours de pétrole céderont 27 % en 2016 avant de regagner environ 30 % en 2017. Les incertitudes entourant l’économie mondiale en général et le marché du pétrole et des produits de base en particulier rendent cependant ces hypothèses particulièrement fragiles, la probabilité qu’il faille les revoir à la baisse étant plus plausible que le scénario inverse.

Les principaux pays africains exportateurs de produits de base sont fortement affectés par ce repli des prix. Dans certains cas, la production des industries extractives a continué de progresser et a donc dopé le PIB alors que dans d’autres, elle a été réduite. Cette faiblesse des cours pèse également sur les recettes et pourrait rejaillir négativement sur l’investissement et les activités de prospection et, ce faisant, amenuiser le potentiel de croissance. Dans plusieurs pays d’Afrique, les recettes tirées des exportations pétrolières et non pétrolières constituent la première source de financement pour les importations et, à travers les rentrées fiscales, les dépenses publiques. Ils doivent désormais faire face à des balances courantes et des taux de change affaiblis et de nouvelles pressions budgétaires. La baisse des cours du pétrole a cependant eu des effets profitables, à travers la diminution du prix du chauffage, des transports et de la production dans les secteurs gourmands en énergie. En 2015, les prix à l’importation des denrées alimentaires de base ont poursuivi leur repli. Associé à la baisse du prix de l’énergie, ce recul atténue les pressions inflationnistes, augmente le pouvoir d’achat des ménages et tend à doper la demande intérieure. Cette évolution pourrait également contribuer à faire reculer la pauvreté.

L’évolution des cours des produits de base peut rejaillir par différents canaux de transmission sur la croissance de l’Afrique. L’impact global dépend du volume des exportations pétrolières et non pétrolières mais également des importations de pétrole et de produits vivriers. Selon une analyse de la Banque africaine de développement, à court terme, l’impact sur la croissance à travers le canal des exportations (évolution des cours en pourcentage) est particulièrement important dans le cas du pétrole, suivi par les métaux et le prix à l’exportation des produits agricoles. À long terme cependant, ce sont les prix à l’exportation des produits agricoles qui auront l’effet le plus marqué sur la croissance des pays exportateurs. La hausse du prix moyen des produits de base entre 2010 et 2014 entrerait donc à hauteur de 30 % environ dans la croissance des pays africains exportateurs, d’après la Banque africaine de développement. Par conséquent, si les cours restent à leurs niveaux actuels, les perspectives de croissance pour ces pays-là seront inférieures aux prévisions avancées ici, qui tablent sur un redressement progressif des cours en 2017.

LA Rédaction (avec BAD, BM, FMI, et Knowdys Database)