Afrique du sud : la Bourse s’envole malgré l’incertitude

La Bourse de Johannesburg (JSE) bat record sur record alors que l’Afrique du Sud revoit ses prévisions de croissance à la baisse sur fond de crise mondiale et craint des désordres sociaux après la terrible fusillade de la mine de Marikana. Décryptage.

L’indice élargi All-share Index a gagné 0,29% le 27 août 2012 pour atteindre le niveau historique de 35.897,69 points, tandis que l’indice Top-40 a progressé de 0,26%. Les deux indices ont bondi de 12% depuis le début de l’année.

« A première vue, ça paraît bizarre », concède Richard Schellbach, analyste chez Citigroup à Johannesburg.

« L’économie mondiale ne va pas bien et l’économie sud-africaine est sur le déclin, ou du moins ne croît pas autant que nous l’aurions pensé », ajoute-t-il.

« Ce n’est pas parce que le JSE s’envole qu’il faut nécessairement être heureux », approuve Dennis Dykes de Nedbank.

Affectée par la crise mondiale, la première économie d’Afrique, très ouverte sur l’Europe, a sérieusement revu ses prévisions de croissance à la baisse à 2,6% ou 2,7% cette année. Soit 1,5 point de moins que ce qui était prévu au début de l’année, relève l’analyste.

L’actualité économique et sociale est marquée par la constante pression de l’aile gauche du Congrès national africain (ANC), le parti au pouvoir, qui demande sans relâche nationalisation des mines et partage des richesses. Ce qui devrait logiquement faire pâlir la Bourse, le gouvernement ne cessant de louvoyer.

Et ces derniers jours, le pays a été marqué par les violences qui ont endeuillé la mine de platine de Marikana (nord), faisant 44 morts, dont 34 grévistes abattus par la police.

Le mouvement, qui porte sur les salaires, a attiré l’attention sur la misère des mineurs. Et il risque toujours de s’étendre à d’autres entreprises du secteur.

Certains courtiers font cependant remarquer que le drame de Marikana a fait baisser le rand sud-africain, ce qui est bon pour les exportateurs. Et notamment les ventes de matières premières, libellées en dollars.

M. Dykes cite aussi des facteurs externes, comme la conférence de la Réserve fédérale américaine (Fed) à Jackson Hole (Etats-Unis) ou l’action attendue de la Banque centrale européenne (BCE) pour tenter de régler la crise de la zone euro.

Plus généralement, si l’on parle toujours des mines en Afrique du Sud, « il y a tous les autres secteurs auxquels on ne pense généralement pas, et qui se sont extrêmement bien portés cette année » à la Bourse de Johannesburg, relève Richard Schellbach.

Il cite notamment la santé, le commerce et les médias dont, souligne-t-il, de nombreuses entreprises sont « bien gérées et prudentes ».

« Le consommateur local (sud-africain) est toujours capable d’emprunter et de dépenser », renchérit Ryan Seborne, analyste à 36One, qui confirme que « les bilans sont bons ».

« Les derniers chiffres des ventes de détail montrent une croissance annuelle de 8,3%, ce qui s’est traduit par de bons revenus et des résultats d’entreprises supérieurs aux prévisions, ce qui a soutenu l’investissement local et étranger », poursuit Shaun Murison d’IG Markets SA.

Les cours de certains groupes de la distribution comme Woolworths, Foschini ou Mr Price se sont ainsi envolés de plus de 40% depuis le début de l’année, souligne-t-il.

« Cela a permis de compenser la baisse d’un secteur des matières premières qui souffre d’une multitude de problèmes allant de la violence à la (faiblesse de la) demande », ajoute-t-il.

(Avec AFP)