CEO Forum : l’Afrique s’impose dans les agendas mondiaux

(Africa Diligence) Organisé par Jeune Afrique, la Banque africaine de développement et le groupe Rainbow Unlimited, l’Africa CEO Forum vise, dans cette 2ème édition, « à débattre des moyens d’accélérer les transformations structurelles du continent et de capitaliser sur les bouleversements majeurs en cours ».  Comment l’Afrique s’impose dans les agendas.

Les prévisions pour l’Afrique du rapport Situation et perspectives de l’économie mondiale donnent le tournis. Publié par les Nations unies, il indique pour 2015 8,5 % de croissance pour la République démocratique du Congo, idem pour le Ghana, 9,5 % pour la Sierra Leone, 7,4 % pour la Zambie, 9,4 % pour la Libye, 7,1 % pour le Mozambique, 7 % pour le Liberia… Autant dire qu’en termes de quantité, l’Afrique est bien partie. Pour ce qui est de la qualité, par contre, cette embellie a besoin d’être irriguée par une réflexion poussée sur les problèmes qui se posent aujourd’hui à la plupart de ses économies. C’est pour répondre à cette problématique que les rencontres économiques se multiplient à propos du continent. Build Africa à Brazzaville sur les infrastructures début février, l’Africa SMB Forum à Casablanca dans le but d' »interconnecter et financer les PME pour l’emploi et la croissance inclusive en Afrique » la semaine dernière, et maintenant l’Africa CEO Forum à Genève, jusqu’au 19 mars, avec pour thème central « l’entreprise » comme « moteur de la transformation économique de l’Afrique ». Organisé de concert par le Groupe Jeune Afrique, la Banque africaine de développement et le groupe Rainbow Unlimited, l’Africa CEO Forum vise, dans cette deuxième édition, « à débattre des moyens d’accélérer les transformations structurelles du continent et de capitaliser sur les bouleversements majeurs en cours ».

Parmi les questions posées, celle de la compétitivité

C’est donc à la lumière de ce dessein qu’il faut apprécier le thème de la compétitivité qui ouvre ses travaux. Il faut dire que, selon la Banque mondiale, quatorze des vingt économies les moins compétitives du monde sont africaines. Et selon Amir Ben Yahmed, initiateur de ce grand rassemblement, « il y a une quarantaine de places entre l’Asie et l’Afrique, et une vingtaine entre l’Amérique du Sud et l’Afrique ». De quoi illustrer que le continent a encore du chemin à faire. Au-delà, il pointe la question de l’énergie, fondamentale à la fois pour le développement des services et aussi pour une industrialisation locale nécessaire à un meilleur partage de la valeur et à un enracinement de la croissance dans les populations africaines. L’enjeu : les emplois créés. C’est tout l’enjeu de la transformation locale, également abordée dans l’Africa CEO Forum, la finalité étant de faire profiter le secteur privé africain des opportunités nées de l’exploitation des ressources naturelles du continent.

De vrais challenges : l’intégration financière, l’agrobusiness et le numérique

Autre plan, autre problème : « Beaucoup d’épargne ne peut pas facilement bouger d’un pays à un autre « , dit Amir Ben Yahmed. Dès lors, il s’impose de s’interroger à la fois sur le concept d' »africapitalisme », popularisé par l’homme d’affaires nigérian Tony Elumelu, et sur les réalités entourant l’ouverture du capital de structures locales à des investisseurs étrangers. Au regard des risques et conflits qui peuvent en découler, l’Africa CEO Forum ouvre un débat sur les conditions d’un « mariage heureux ». À l’heure où en direction de l’Afrique se multiplient les fonds de private equity, les fonds d’investissement…, la question n’est pas anodine. En toile de fond se profile la problématique de l’intégration financière avec l’augmentation significative des opérations boursières transfrontalières.

Au-delà, la révolution numérique interroge également. « Comment les entreprises africaines peuvent-elles en tirer parti au maximum ? » se demande, avec ses 700 participants, le forum. Enfin, il y a l’agrobusiness. Avec 60 % des terres arables du monde, l’Afrique est engagée dans un double challenge : d’abord, renouer avec une agriculture dont il va falloir améliorer la productivité et baisser les coûts face aux menaces constituées par les importations frauduleuses à grande échelle ; ensuite, réussir sa transformation structurelle en créant des emplois durables et en assurant sa sécurité alimentaire. Tout cela, alors que de vastes étendues de terres fertiles sont vendues à des pays étrangers ou à de grandes multinationales.

Il n’y a pas de doute. L’Afrique ne pourra pas faire l’économie d’un supplément d’âme à injecter dans sa croissance si enviée. « La nécessité de libérer les énergies pour favoriser la croissance est de mieux en mieux comprise, dit Amir Ben Yahmed. Mais, ajoute-t-il, cette croissance inclusive ne peut pas être forte sans l’apport du secteur privé. » Et de conclure : « Les transformations s’accélèrent, mais attention de ne pas s’emballer et minimiser les obstacles. »

(Avec Malick Diawara)