Doing Business : Bretton Woods dans le piège de la simplification administrative

[Africa Diligence] Le rapport 2017 de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires révèle qu’un nombre record d’économies ont mis en œuvre des réformes significatives qui facilitent la création et le développement des petites et moyennes entreprises. Et si la simplification administrative cachait la poussière sous le tapis…

Le nouveau rapport constate que 75% des 283 réformes enregistrées l’année dernière sont nées dans les pays en voie de développement, avec l’Afrique sub-saharienne représentant plus d’un quart de ces réformes.

Le rapport Doing Business 2017 a attribué la première place à la Nouvelle-Zélande dans son classement. Singapour occupe la deuxième place, suivie par le Danemark, la RAS de Hong Kong, Chine, la République de Corée, la Norvège, le Royaume-Uni, les États Unis, la Suède, et l’ancienne République yougoslave de Macédoine.

Le top 10 des réformateurs, basé sur le nombre des réformes qui ont été mises en œuvre, sont Brunei Darussalam ; le Kazakhstan ; le Kenya ; la Biélorussie ; l’Indonésie ; la Serbie ; la Géorgie ; le Pakistan ; les Émirats arabes unis (EAU) ; et le Bahreïn.

Le rapport s’appuie sur de la recherche qui montre qu’en général, les économies ayant une meilleure performance dans Doing Business sont souvent associées à des niveaux moindres d’inégalité des revenus, réduisant ainsi la pauvreté et partageant la prospérité.

Les données de Doing Business soulignent que de plus en plus de gouvernements adoptent des réformes significatives pour améliorer le climat des affaires. Créer une nouvelle entreprise prend maintenant 21 jours en moyenne à travers le monde, contre 46 jours il y a 10 ans. Aujourd’hui, pour payer ses impôts aux Philippines il faut seulement 28 paiements, contre 48 il y a 10 ans de cela ; et au Rwanda, le temps pour transférer une propriété est passé de 370 jours il y a une décennie à 12 jours maintenant.

« Des règles simples et faciles à suivre sont un signe de respect du gouvernement envers ses citoyens. Cela apporte de nombreux bénéfices à l’économie – un esprit d’entreprise plus développé ; plus d’opportunités pour les femmes ; et un meilleur respect de la loi », a déclaré Paul Romer, économiste en chef et vice-président de la Banque mondiale, « On doit aussi se rappeler que d’être traité avec respect est quelque chose que tout le monde apprécie pour sa propre valeur et un gouvernement qui faillit à cette tâche perd ses qualités de dirigeant. »

Le rapport 2017 ajoute de nouvelles données sur l’égalité hommes femmes dans trois de ses indicateurs : la création d’entreprise, le transfert de propriété et l’exécution des contrats – et constate des disparités dans 38 économies. Vingt-trois de ces économies imposent aux femmes mariées des étapes supplémentaires pour créer une entreprise. Seize économies ne donnent pas aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes à posséder, utiliser et transférer des biens immobiliers. Doing Business estime que dans ces économies, il y moins de femmes au travail dans le secteur privé, que ce soit en tant qu’employeurs ou employées

En outre, l’indicateur paiements des taxes et impôts couvre désormais les processus postérieurs à la déclaration d’impôts, tels que les remboursements de la TVA, les contrôles fiscaux et les recours administratifs, afin de mieux comprendre l’environnement fiscal dans le monde. Depuis sa création en 2004, Doing Business a comptabilisé 443 réformes pour cet indicateur, ce qui fait de lui le deuxième indicateur ayant enregistré le plus grand nombre de réformes, avec un total de 46 réformes l’année dernière. Cependant, avec presque 600 réformes depuis 2004, la création d’entreprise reste de loin le domaine de réforme le plus courant. Parmi ces réformes, 49 ont été introduites au cours de l’année écoulée.

« La politique du gouvernement joue un rôle déterminant dans le fonctionnement quotidien des petites et moyennes entreprises nationales. Une réglementation lourde peut détourner l’attention des entrepreneurs de leurs priorités qui sont d’innover et de développer leurs entreprises. La collecte de données de Doing Business, sert à encourager les gouvernements à mettre en place des réglementations efficaces, simples et accessibles » a déclaré Augusto Lopez-Claros, Directeur du Département des Indicateurs du Groupe de la Banque mondiale.

Le rapport 2017, présente un indicateur pilote sur la règlementation des marchés publics. L’indicateur sur la passation des marchés publics couvre 78 économies et n’est pas inclus dans le classement global des économies. Cet indicateur étudie cinq domaines : l’accessibilité et la transparence, la sécurité de l’offre, les retards de paiement, les incitations pour les petites et moyennes entreprises et les mécanismes pour porter plainte. Les marchés publics représentent en moyenne, entre 10 à 25 pour cent du PIB d’une économie, ce qui fait de la passation des marchés publics une opportunité unique pour le secteur privé.

Les économies d’Afrique sub-saharienne ont intensifié le rythme des réformes, avec 37 économies ayant mis en œuvre un total de 80 réformes l’année dernière, soit une augmentation de 14 pour cent par rapport à l’année précédente. Pour la deuxième année consécutive, le Kenya était parmi le top 10 des réformateurs, sept économies ont fait quatre réformes ou plus pendant la dernière année. Cependant, 13 des économies de la région ont des législations qui créent des barrières supplémentaires pour les femmes entrepreneurs.

« L’objectif principal de Doing Business est d’encourager l’esprit d’entreprise, pour les femmes et les hommes, en particulier dans les pays à revenu faible et moyen. Il est très encourageant de voir que les gouvernements du monde entier relèvent le défi d’améliorer le climat des affaires, afin de faciliter la création d’emplois, et nous sommes impatients de voir si les années à venir seront aussi productives que l’année dernière », a déclaré Rita Ramalho, Manager du projet Doing Business.

Responsable du programme « Doing Business in Africa » à l’Ecole Centrale de Paris, Guy Gweth mesure, quant à lui, la distance qui existe entre les réformes affichées par les Etats africains et la facilité réelle à faire des affaires. « Plusieurs pays ont compris qu’en s’attachant les services d’un cabinet d’experts en simplification administrative, ils gagnent rapidement des points dans le classement de la Banque mondiale. Mais les usagers ne s’y trompent plus. Ce qu’il faut désormais réformer, ce sont les mentalités », conclut le fondateur de Knowdys Consulting Group, leader du conseil en intelligence économique en Afrique subsaharienne.

La Rédaction (avec le Groupe de la Banque mondiale et Knowdys Database)