L’incitation fiscale peut-elle relancer le secteur privé camerounais ?

(Africa Diligence) Le train de mesures pris par le gouvernement camerounais au 4è trimestre 2013 peut sembler séduisant au premier abord, mais il convient de prendre du recul pour juger de sa pertinence et de son impact réel sur l’économie nationale. 4 raisons à cela:

Premièrement: l’analyse des stratégies d’incitations à l’investissement privé mises en place dans les six pays de la zone CEMAC, au cours des dix dernières années, montre que les régimes spécifiques aux PME deviennent souvent, au bout de quelques années, des zones refuges où les petites entreprises stagnent. C’est pourquoi j’appelle le gouvernement camerounais à créer les conditions d’incitation à la croissance des PME pour produire des champions nationaux comme dans des pays tels que le Maroc ou l’Afrique du Sud.

Deuxièmement: les retours d’expérience des entreprises que nous accompagnons dans la zone CEMAC concluent unanimement que la charge liée au respect des obligations fiscales dans nos pays est aussi lourde que le taux de fiscalité. Il suffit d’ailleurs de jeter un regard sur les notes successives du Cameroun dans les indicateurs » Paying the Taxes » de Doing Business pour s’en convaincre. C’est pourquoi j’appelle le gouvernement camerounais à aller plus loin dans les réformes en engageant un vrai choc de simplification. Cela passe notamment par une plus grande simplification des processus de dépôt, de paiement, des formulaires fiscaux, etc.

Troisièmement: l’expérience a montré, à maintes reprises et dans plusieurs pays, qu’il est contre-productif d’utiliser l’incitation fiscale pour compenser les insuffisances nationales telles que le manque d’infrastructures ou le non-respect des normes juridiques. C’est pourquoi j’appelle le gouvernement camerounais à tout faire pour doter notre pays d’un corpus fiscal plus clair et plus stable. Il nous faut un instrument qui laisse peu de place à l’arbitraire et à la négociation entre le contribuable et les autorités fiscales; un socle dans lequel les investisseurs locaux et étrangers trouveront un gage de la primauté du droit dans notre pays.

Quatrièmement: il apparait, à travers ses choix, que le gouvernement camerounais a véritablement entrepris de faire de la fiscalité un instrument de correction des défaillances du marché dans les secteurs prioritaires comme l’habitat, l’agriculture, l’élevage, les industries manufacturières, l’industrie pharmaceutique ou le tourisme. C’est, à nos yeux, la principale bonne nouvelle de ce train de mesures.

Conclusion: pour s’assurer de la pertinence de toutes ces mesures, il faudra attendre que le Comité Paritaire de Suivi prévu par la loi du 18 avril 2013 produise des évaluations transparentes à intervalles réguliers.

Guy Gweth, CEO de Knowdys Consulting Group