Honoré K. Kietyeta, chargé de vendre le Burkina Faso aux investisseurs malgré la crise

[Africa Diligence] Directeur de la promotion et du marketing de l’Agence nationale de promotion des investissements du Burkina Faso, Honoré K. Kietyeta est titulaire du Master en Finance d’entreprise de l’École Supérieure de Gestion de Paris. Après 12 ans dans le secteur privé en Afrique de l’Ouest, dans les secteurs de la finance, de la téléphonie mobile et des ONG, il a la charge de vendre le Burkina aux investisseurs. À tout prix.

Malgré les troubles politiques actuels dans son pays, le jeune leader Burkinabè – qui côtoie les investisseurs du monde entier désireux de prendre pied au Burkina Faso – nous livre, en exclusivité, son analyse de l’émergence économique de l’Afrique, depuis Ouagadougou.

Africa Diligence : Croyez-vous en l’émergence économique du continent africain ?

Honoré Kietyeta : C’est devenu presqu’une réalité pour certains États africains. Mais la question doit être analysée selon les pays. De façon générale, nous croyons à l’émergence économique de l’Afrique au regard des performances économiques positives enregistrées à travers le continent, du large potentiel non encore exploité, des efforts de planification et de bonne gouvernance déployés par la plupart des gouvernements. Aussi, nous observons que les privés sont les bienvenus dans des secteurs dits stratégiques ou structurants. En témoigne l’attrait du continent pour les investisseurs internationaux, et la hausse des investissements intra-africains. Singulièrement, nous constatons que des pays disposent de programmes économiques qu’ils appliquent effectivement. Ils le font indépendamment des changements politiques, et avec beaucoup de rigueur. Ils font preuve de bonne gouvernance, démontrent une bonne maîtrise des indicateurs macroéconomiques depuis des décennies, disposent de ressources humaines qualifiées et d’infrastructures de haute qualité pouvant soutenir l’industrialisation de leur pays et accueillir les délocalisations. Ils ont une classe moyenne dense grâce à des niveaux de PIB proches de 5,000 USD/habitant, et ils accèdent à des marchés solvables grâce aux accords économiques régionaux. Nous pensons qu’il est beaucoup plus réaliste de parler d’émergence économique à moyen terme pour cette catégorie de pays.

S’il fallait vous aider à contribuer au développement rapide de l’Afrique, quels leviers pourrait-on activer ?

De notre point de vue, on pourrait offrir aux jeunes décideurs Africains des opportunités de formation, de partages d’expérience ou d’étude de cas sur les pays d’Asie du Sud-Est ou des BRICS. En l’absence de conflit d’intérêt ou des relations historiques telles que celles qui nous lient aux pays développés, les débats se dérouleront sans doute avec moins de complexe. Il y aurait moins de prédispositions naturelles de la part des Africains à tout accepter. Les progrès économiques récents de ces pays autrefois colonisés, avec une forte présence de PME/PMI, dans un contexte de rareté de ressources financières et de ressources naturelles, peuvent à plus d’un titre forger une vision. C’est une chose essentielle pour enclencher le développement.

Il faudrait par ailleurs accélérer la réalisation de projets structurants, en accroissant les fonds d’assistance technique au profit des États pour le développement des projets et le renforcement de leur capacité dans la négociation des contrats de type PPP. Ces fonds devront bénéficier également aux entrepreneurs locaux pour la réalisation d’études de faisabilité et de montage de business plan.

Enfin l’appui que nous aimerions avoir, c’est d’amener et encourager les premiers responsables des pays à développer des initiatives de promotion de la bonne gouvernance.

Si vous vous retrouviez à la tête de votre pays, dans les 24 heures, quelles seraient vos trois premières décisions ?

Cette question est un peu spéciale pour nous, au regard de la situation politique actuelle au Burkina Faso. Nous pensons que ce que nous engagerions pour notre pays c’est d’instituer un cadre de concertation pour convenir des trois décisions urgentes à prendre.

Que pensez-vous de l’avènement du Centre Africain de Veille et d’Intelligence Économique ?

L’avènement de toute institution à vocation intellectuelle et de plus portée par des africains est toujours à saluer. Nous attendrons de la part de ce centre que les recommandations issues de leurs travaux soient des solutions contextualisées, c’est à dire basées sur les réalités des pays africains. Ce serait le « vrai plus » de ce Centre.

Propos recueillis par la Rédaction

© Knowdys Database 2015 – Cet article ne peut être repris qu’à condition d’en mentionner la source et le lien.