Le Centre Africain de Veille et d’Intelligence Économique au Djibouti

[Africa Diligence] A l’occasion du deuxième anniversaire du Centre Africain de Veille et d’Intelligence Economique (CAVIE), son président a entamé une tournée dans cinq pays : Mali, Djibouti, Burkina Faso, Niger et Sénégal. A l’occasion de l’étape djiboutienne, tenue du 21 au 26 août 2017, il a accordé une interview exclusive.

VoNews : Guy Gweth, quel est votre bilan à la tête du CAVIE au bout de deux ans ?

Guy Gweth : Je vous remercie, avant tout, pour cette opportunité qui nous permet de mieux expliquer nos actions au grand public. En 24 mois d’existence, nous avons réalisé trois actions majeures, si on met de côté la vieille quotidienne, les conférences, les formations et l’importante tournée africaine organisée autour de l’indépendance énergétique que nous avons entamé le 11 août dernier, à Bamako, au Mali.

  1. Dans le domaine de la veille et de l’intelligence économique (IE) et stratégique, nous avons réussi à imposer le CAVIE comme l’organisation africaine de référence en matière de fédération des professionnels africains de l’IE, de formation des entreprises, ONG et personnes physiques, à l’approche africaine de l’IE, et de surveillance des marchés africains, dans 12 secteurs clés de l’économie africaine. Cela a notamment valu au Centre d’être invité à participer aux travaux de l’Union Africaine, à Addis-Abeba, en 2016.
  2. Nous avons créé le Référentiel Africain de Veille et d’Intelligence Economique (RAVIE). Véritable carte d’identité de l’IE africaine, cet instrument clarifie notre définition de l’IE, dessine son territoire, et précise son contenu, ainsi que les critères d’évaluation des formations en IE. Cela a principalement servi à bâtir le projet pédagogique du futur MBA « Intelligence économique et stratégie africaines » qui sera lancé prochainement à Paris
  3. Enfin, nous avons ouvert notre première antenne européenne, en janvier 2017, au sein du patronat belge et de la Chambre de Commerce de Bruxelles, même si le succès escompté reste attendu, certains ayant cru à tort qu’ils pouvaient se servir de cet outil pour – une fois de plus – aliéner les intérêts de l’Afrique, ce qui est, bien sûr, totalement exclu. Fort heureusement, d’autres entreprises, singulièrement disruptives, ont compris qu’en passant par le CAVIE, elles ont une chance unique de toucher plus de la moitié du continent, à la fois, grâce à l’étendue et à la haute qualité de notre réseau de professionnels.

Outre cette difficulté à agir, en toute indépendance, avez–vous d’autres contraintes ?

La question que vous posez est cruciale à nos yeux. Pas un jour ne passe sans que nous ne nous interrogions sur le moyen le plus sûr de garantir l’indépendance financière du Centre. C’est le lieu de féliciter tous les membres qui attachent du prix à être à jour de leur cotisation annuelle, et piochent parfois dans leur budget pour la réussite d’une conférence publique, car au-delà de leur engagement, ils perçoivent l’enjeu stratégique qui gît dans cet acte. Il est établi qu’un plus grand nombre d’acteurs économiques bénéficieraient des services du CAVIE si le Centre était totalement autonome financièrement. Mais combien d’organisations à but non lucratif le sont à l’échelle internationale ? Pas grand monde. C’est pourquoi l’un des axes de ma tournée actuelle est de sensibiliser les pouvoirs publics et les entreprises africains à solliciter le CAVIE autant que possible. Au Mali, c’est nous qui allons réaliser la première étude nationale sur les besoins énergétiques ; et à Djibouti, nous allons œuvrer à la performance des administrations publiques. Ces missions, réalisées aux conditions les plus compétitives, par nos membres les plus qualifiés, concourent à l’autonomie financière du Centre.

A propos du Djibouti, justement, où vous avez tour à tour été reçus par les plus hauts responsables du secteur de l’énergie du pays, ainsi que le secrétaire général du ministère des affaires étrangères, quel est l’état de l’intelligence économique ?

Avant de répondre à cette question, permettez-moi de remercier très chaleureusement les autorités du pays qui ont accepté de nous accueillir, malgré des agendas surchargés, et tout particulièrement Son Excellence Monsieur Ismaïl Omar Guelleh, le Président de la République, Monsieur Mohamed Ali Hassan, le Secrétaire général du Ministères des affaires étrangères et de la coopération internationale, et Monsieur Djama Ali Guelleh, le Directeur général de Electricité de Djibouti. Avec l’aide précieuse de Madame Racha Farah, Représentante résidente du CAVIE à Djibouti, nous avons été saisis par « l’exception djiboutienne » : à savoir qu’à Djibouti, ils font de l’intelligence stratégique sans la nommer. Présents militairement et économiquement dans ce pays de 946 000 habitants, sur 23.200 km2, Américains, Chinois, Français, Japonais, et Italiens, notamment, sont bien placés pour en parler. Il est d’ailleurs frappant de voir comment le repli progressif de la France, de cette partie hautement stratégique du continent, profite aux sept pays de tête que sont : la Chine, les Etats-Unis, l’Allemagne, les Pays-Bas, les Emirats Arabes Unis, le Qatar et l’Ethiopie.

Auriez-vous un dernier message à faire passer ?

Ce serait surtout de vous remercier pour cette opportunité. L’ADN de nos activités étant la discrétion, il n’est jamais aisé, pour nous, de communiquer pour notre propre compte. Mais comment faire comprendre à un plus grand nombre d’acteurs économiques qu’ils peuvent compter sur le CAVIE, en tant que structure continentale militante, flexible, non-étatique et redoutablement efficace pour comprendre et surveiller les marchés africains, initier et développer leurs activités sur le continent, et se former aux plus hauts standards de l’IE, si ce n’est en profitant des occasions uniques comme cet entretien ? Acceptez toute notre gratitude.

Pour en savoir plus sur le CAVIE

Le CAVIE a été légalisé le 03 août 2015, à Yaoundé, République du Cameroun. Il a pour objet, d’une part, de promouvoir les bonnes pratiques de veille et d’intelligence économique en Afrique, ainsi que leurs implications dans la compétitivité du continent ; et, d’autre part, d’aider les entreprises à mieux connaître le marché africain de manière à y développer des relations commerciales en parfaite connaissance de cause. Le CAVIE vise notamment à :

  • Sensibiliser les pouvoirs publics, les représentations diplomatiques, les partenaires au développement, les entreprises, et le monde éducatif, aux enjeux de compétitivité de la veille et de l’intelligence économique dans les pays africains.
  • Mettre en place des dispositifs de sensibilisation et de formation aux spécificités de la veille et de l’intelligence économique dans chaque pays africain.
  • Initier la création et le développement des dispositifs de veille sectorielle et d’intelligence économique et stratégique au sein des institutions publiques et privées, aussi bien en Afrique, que dans les pays et organisations en relation avec l’Afrique.
  • Aider les États, investisseurs, entreprises, organismes de développement et médias à mieux appréhender les marchés africains grâce à des journées portes ouvertes, études, publications, conférences et formations dédiées.
  • Permettre à tout investisseur et à toute entreprise de trouver les meilleures réponses à ses questions concernant ses projets d’investissements, ses recherches de partenaires locaux, et ses implantations potentielles sur les marchés africains.
  • Contribuer à la fédération, à la représentation, à la défense, et à la promotion des intérêts économiques des États et des entreprises d’Afrique auprès des institutions supranationales et paraétatiques grâce à la veille et l’intelligence économique.

Interview réalisée par Fabienne Diouf Guillabert