Négociateurs africains : comment minimiser et transformer leurs faiblesses en avantages

[Africa Diligence] Pour Ababacar MBENGUE, Professeur Agrégé en sciences de gestion et CEO de Knowdys Consulting Group, minimiser et transformer les faiblesses de négociateurs africains en avantages passe par deux actions possibles. « Primo, des actions visant à rééquilibrer, voire inverser le rapport de forces et, secundo, des actions efficaces en situation spécifique de rapport de forces défavorable. » Décryptage.

Tout le monde sait que le pouvoir est l’un des facteurs les plus importants dans les négociations dans la mesure où un négociateur en position de force va probablement essayer de profiter de son pouvoir. Il est donc logique d’en conclure que les acteurs africains doivent impérativement renforcer leur pouvoir de négociation autant que possible.

« Pour cela, estime le professeur Ababacar MBENGUE, ancien du Prytanée militaire de Saint-Louis du Sénégal, les négociateurs africains doivent commencer par retrouver l’entière confiance en eux-mêmes et jouer pleinement leur partition d’acteurs à part entière. Se fixer des objectifs ambitieux, diagnostiquer les situations avec méthode et imaginer des stratégies créatives et pertinentes doit devenir pour eux une règle de base. Les acteurs africains, poursuit-t-il, doivent par ailleurs systématiquement œuvrer à briser le dispositif qui organise leur marginalisation voire leur exclusion.

Les analystes de Knowdys Consulting Group considèrent que les Africains doivent rester unis autant que possible, mutualiser leurs ressources (humaines, financières, techniques…) et peser davantage sur la fixation des objectifs généraux et des règles du jeu des diverses négociations internationales dans le sens d’un allègement du coût et de la simplification de la structure desdites négociations internationales. Mais en attendant de parvenir à réduire –et pourquoi pas– inverser le déséquilibre du rapport de forces, les acteurs africains peuvent recourir à diverses techniques mobilisables en situation de rapport de forces défavorable.

« Pour commencer, explique Ababacar MBENGUE, plusieurs fois Président du Concours d’Agrégation CAMES, « il faut noter qu’en situation de faiblesse, un négociateur a tout intérêt à encourager son interlocuteur à s’engager dans des solutions mutuellement satisfaisantes (gagnant-gagnant). Plusieurs études montrant que les négociateurs sont plus susceptibles d’atteindre des solutions gagnant-gagnant lorsqu’ils ont chacun plusieurs choix possibles, il est essentiel pour les acteurs africains d’inclure de manière routinière dans leur démarche une analyse systématique et méthodique des différentes options disponibles pour eux-mêmes et pour leurs divers interlocuteurs. »

Le CEO de Knowdys Consulting Group fait remarquer que la définition en amont de la stratégie de négociation pour les acteurs africains est d’autant plus cruciale que la compréhension et la stratégie sont particulièrement importantes dans les situations où le pouvoir, les ressources et le contrôle sont inégalement répartis. « Former des coalitions, argumente-il, est une seconde réponse naturelle à un déséquilibre de pouvoir. La capacité d’un acteur en position de faiblesse d’inscrire d’autres acteurs dans une coalition (pouvoir d’enrôlement) est une importante source de contournement d’un rapport de forces initial défavorable ».

À titre d’exemple, les stratèges de Knowdys Consulting Group estiment que les États africains pourraient impliquer dans l’arène de négociation les sociétés civiles et les ONG, africaines comme internationales. Ils rappellent volontiers que « l’Afrique de l’Ouest a pu être mieux entendue dans les négociations sur le changement climatique grâce à l’action conjointe du comité inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) et de l’Alliance mondiale contre le changement climatique (AMCC) de l’Union Européenne. »

Concernant la question de savoir comment transformer en avantages les faiblesses des acteurs africains dans les négociations internationales, la solution la plus directe est de changer les règles du jeu… à son avantage. Pour le premier professeur Agrégé en sciences de gestion d’Afrique francophone, « l’argument radical peut être écologique : réduire les coûts et la complexité de la structure actuelle des négociations internationales. »

Articles/ouvrages publiés par le professeur Ababacar MBENGUE sur les négociations

  1. « La Négociation», Vuibert, 2013 (avec J. Sohier, P. Cottet, S. Sohier et A. Stimec).
  2. « Power and Influence in Sales Negotiation », in Negotiation Excellence: Successful Deal Making, Michael Benoliel (Ed.), World Scientific Publishing, 2011, pp. 161-176, (avec J. Sohier et P. Cottet).
  3. « La simulation d’un marché comme outil pédagogique et de recherche en négociation ». Négociations, pages 59-74, 2011/2 (avec J. Sohier, P. Cottet et S. Sohier).

La Rédaction