Pourquoi la main-d’œuvre tunisienne attire les entreprises

(Africa Diligence) D’un geste vif et précis, casquette fixée sur leur foulard, une trentaine de jeunes femmes payées l’équivalent de 150 euros par mois assemblent méticuleusement des pare-soleil pour berlines de luxe allemandes. Chaque jour, près de 5000 accessoires sont expédiés en France depuis cette usine de Sousse de Tunisie Plastiques Systèmes (TPS, groupe Plastivaloire).

Coût du travail oblige, les marques de luxe (BMW, Porsche) ne sont pas seules clientes. Des décodeurs, des jouets, toutes sortes d’objets en plastique sont envoyés à des entreprises européennes. «Depuis la révolution, le coût du travail est resté stable en euros, même s’il a augmenté de 10% en dinars, explique Chekib Debbabi, directeur de l’usine, les salaires demeurent cinq fois moins élevés qu’en France.» Des produits sont parfois enlevés à la production chinoise. «Nous sommes plus compétitifs que certaines régions chinoises (Shenzhen, etc.) tout en préservant la qualité, souligne Chekib Debbabi, autre avantage, en cas de problème, nous ne sommes qu’à deux heures et demie de Paris.»

En fait, près de 1300 entreprises françaises sont implantées en Tunisie. Parmi elles, Bic, qui vient d’inaugurer une usine de stylos, à Bizerte ; un projet gelé un an par la révolution. «Cet investissement de 12,5 millions d’euros, permettra de desservir les pays du Maghreb», assure Arnaud Boulard, directeur de l’usine. Avec Sanofi, Latécoère ou Zodiac, c’est l’une des rares grandes entreprises présentes dans le pays.

La Tunisie encourage les start-up. Wassel Berrayana, fondateur de Proxym-IT (portail, applications, Internet…), travaillait dans la Silicon Valley avant de s’implanter à Sousse. Ce Franco-Tunisien a opté pour Sousse pour y développer ses produits. «20 % des inventions de la Silicon Valley partent en Inde, souligne-t-il. C’est inutile d’aller si loin car des coûts concurrentiels et une main-d’œuvre qualifiée existent en Tunisie.» Pour les ingénieurs, il tempère les avantages des coûts du travail. «Pas de méprise, dit-il, les ingénieurs débutants sont payés deux fois et demie le smic. Le vrai atout de la Tunisie, c’est la qualité et le nombre de ses jeunes diplômés.» C’est sans doute le vrai potentiel pour cette Tunisie où on aime à dire que la situation politique est désormais quasiment stabilisée. À quelques exceptions près…

 Charles GAUTIER