Tendance: le sponsoring à l’assaut des First Ladies

Michelle Obama & Daughters La future Première Dame des Etats-Unis a beau déclaré qu’elle ne s’immiscera pas dans les décisions politiques de Barack Obama, qu’elle passera le plus clair de son temps à veiller sur leurs filles Malia et Sasha, les plus jeunes locataires de la Maison-Blanche depuis les Kennedy, aucun analyste sérieux n’y croit. A l’heure où, partout dans le monde, le débat public confine les First Ladies à l’action humanitaire, nombre de stratèges en entreprise ont fait le choix d’investir dans le cœur et l’aura de celles qui mènent au Président… Surtout dans les pays en développement.

Lorsque Paul Henry* est nommé représentant d’une des filiales de son Groupe* en Afrique fin 2007, il sait que sa mission sera difficile. La concurrence pour le contrôle des ports en Afrique de l’ouest est rendue ardue par de nouveaux entrants aux dents longues. Ces derniers font de bien meilleurs offres aux meilleurs prix et proposent même de multiplier le montant des redevances à payer à l’Etat hôte. Leurs salariés bénéficient de conditions de travail enviables. Ils attirent la presse et alertent l’opinion publique en cas d’entorse aux procédures de passation des marchés au port. Leurs services de veille stratégique et de relations publiques fonctionnent à merveille et les résultats s’en ressentent au niveau des décideurs et de la clientèle. Du lourd.

Paul Henry sait que le temps est révolu où il suffisait d’un coup de file pour qu’une concession de 15 ans soit adjugée à son groupe. Il charge une équipe de jeunes consultants en IES* de réfléchir à la stratégie à adopter en vue de réagir à la nouvelle donne imposée par les concurrents. Les règles du jeu ont assurément changé. Les conseils ont quinze jours et quatorze nuits pour fournir leurs conclusions à la direction qui requiert « une pluie d’idées dans un désert de mots ». Traduction de Paul Henry : « Nous attendons des préconisations claires, précises, concises et immédiatement applicables. Non pas 300 pages de littérature dans un jargon d’experts et des schémas cryptés…» Un bureau sécurisé leur est ouvert 24h/24 près de la direction.

Après dix jours de travaux de collecte, de validation, de hiérarchisation et d’analyse des informations pertinentes, la CI Team* (comme elle se fait appeler) a évalué plusieurs scénarios allant des opérations de déstabilisation par l’information, de guerre judiciaire, d’entrisme clandestin, de piratage informatique ou de débauchage de cadres concurrents… Au final, la principale préconisation -pour aussi inattendue qu’elle soit- a été de financer l’association humanitaire de la Première Dame à grand renfort de publicité. Désormais dans les bonnes grâces de la First Lady, le groupe jouit de son influence, y compris devant la justice, dans un pays où le dés-équilibre des pouvoirs profite à l’exécutif. Les experts ont  même envisagé un don d’ordinateurs « intelligents » à l’association en vue d’anticiper ses besoins… en toute discrétion.

Entre un Président élu par le peuple et une femme élue par le Président, le pouvoir est souvent au premier et l’influence à la seconde. Les businessmen l’ont bien compris. La guerre des grands créateurs (Narciso Rodriguez, Christian Lacroix, Karl Lagerfeld ou Marc Jacobs… etc.) pour habiller Michelle, Malia et Sasha lors de l’investiture de Barack Obama le 20 janvier 2009 montre combien il peut être stratégique d’investir sur une First Lady. Qui plus est s’il s’agit d’une avocate brillante ayant une taille mannequin de 1.82 m. et une élégance à tomber par terre… Car chaque fois qu’elle apparaît en public, Michelle Obama rapporte des millions de dollars de chiffres d’affaires  aux sponsors qui misent sur son aura.

Guy Gweth

*Paul Henry : nom de code utilisé pour les besoins de confidentialité.

*Pour des raisons évidentes, le nom du Groupe est gardé sous anonymat.

*IES : abréviation usitée pour « Intelligence économique et stratégique».

*CI Team : « Competitive Intelligence Team » ou en français l’équipe d’IE.