Textile : les industriels chinois à la conquête de l’Afrique

[Africa Diligence] On les savait déjà très présents en Afrique dans le BTP ou les matières premières. C’est dans le secteur du textile que les Chinois investissent dorénavant le continent africain. Pour y vendre leurs produits. Et pour en faire, surtout, une nouvelle base d’exportation.

Entre janvier et août 2012, les exportations chinoises vers l’Afrique ont augmenté de 12 % par rapport à la même période de 2011, pour atteindre 9,8 milliards de dollars (7,3 milliards d’euros), selon une étude menée par la Fédération française de la maille et de la lingerie et dévoilée, mercredi 13 février, au Salon Zoom by Fatex.

Alors que les ventes des entreprises chinoises fléchissent aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe – et même en France, ce qui est nouveau –, l’Afrique leur « offre de nouvelles opportunités », soulignent Anne-Laure Linget, Ulyana Sukach et Louis-François Bacou, les auteurs de cette étude qui analyse les tendances du « sourcing » (l’approvisionnement).

Usines beaucoup plus compétitives

Premier pays exportateur de textile de la planète, la Chine investit de plus en plus directement sur le sol africain et tend à y maîtriser l’ensemble de la filière. Que ce soit à travers l’achat de champs de coton pour sécuriser les approvisionnements, ou la création de filatures et d’usines de confection.

Au Zimbabwe, par exemple, un investissement de 30 millions de dollars a été consenti pour créer une coentreprise chinoise dans une filature de coton. Dessociétés chinoises se sont installées au Ghana, au Kenya, au Lesotho, àMadagascar, au Malawi, à l’île Maurice, en Tanzanie ou en Afrique du Sud.

Les Chinois profitent « des accords de l’AGOA étendus jusqu’en 2015 », qui visent« à soutenir l’économie des pays africains en leur facilitant l’accès au marché américain » par des droits de douane réduits, rappellent les auteurs de l’étude.

Cela conduit, ajoutent-ils, à ce que des investisseurs chinois commencent àproduire ou finissent en Afrique des vêtements destinés à être vendus aux Etats-Unis.

La direction des usines est assurée par des Chinois qui emploient des ouvriers africains. Leurs « usines sont beaucoup plus compétitives que celles des entrepreneurs locaux », note l’étude.

Ecarts de salaires

L’étude scrute aussi sur l’évolution des coûts salariaux. En Asie, « on observe de fortes hausses, en moyenne de 15 % par an ». Le salaire mensuel moyen en Chine est désormais de 360 euros, soit 18 % de plus qu’il y a un an. Conjugué aux incertitudes politiques du Maghreb, cela profite aux industriels des pays de l’Est, souligne l’étude.

Dans l’échelle du coût du travail, les écarts sont abyssaux. Si le coût horaire dans le textile est de 31,28 dollars en France – en tête du peloton mondial – les pays où il est inférieur à 2 euros intègrent la Bulgarie, la Malaisie, l’Albanie, l’Indonésie, l’Inde, le Vietnam et le Pakistan.

Sans oublier les moins bien lotis de la planète : Bangladesh et, pire, la Corée du Nord, qui commence à confectionner des habits et à les exporter. Les douanes françaises ont vu transiter les premiers vêtements nord-coréens depuis 2011.