Intelligence collective VS fuite des capitaux en Afrique

(Africa Diligence) Les pays africains doivent mettre en place un système de partage d’informations régionales pour faire face au fléau de fuite de capitaux. C’est ce qui ressort du forum sur les flux financiers illicites d’origine africaine organisé le 16/12/13 à Dakar par Osiwa et la Fondation Trust Africa.

Le pillage des richesses de l’Afrique, au cours des 30 dernières années, est presque égal à la croissance du produit intérieur brut actuel de tout le continent. Il a sérieusement privé des millions d’Africains de ressources financières utiles. Bien que l’Afrique ait connu une croissance économique sans précédent dans la plupart de ces pays, ce bond en avant ne s’est pas traduit par une amélioration des conditions de vie des populations.

Soucieux du devenir du continent, des experts et parties prenantes issus d’organismes régionaux, des représentants de gouvernements, des agents anti-corruption, des institutions financières internationales et de la société civile ont débattu, le 17/12/13, des dispositions à mettre en place pour lutter efficacement contre les fuites de capitaux.

Ce problème se présente sous deux formes, explique Tom Cardamone, directeur management du Global financial integrity (Gfi) qui a mené une étude récente sur la fuite de capitaux en Afrique. D’abord, la fuite se fait par des flux licites tels que l’investissement, l’aide étrangère, l’allègement de la dette et les transferts de fonds à l’intérieur et hors du pays. Il y a aussi des flux illicites tels que les produits de la criminalité, la corruption et l’évasion fiscale.

Pour faire face à ce fléau, les experts militent pour la création d’une forte action publique de collaboration et de lutte contre ces flux financiers illicites. « Nous ne pouvons pas nous en sortir, chacun de son côté ! Il faut que nous travaillions à l’unisson pour combattre ces flux illicites et trouver un système de partage d’informations entre les pays africains », soutient Akwasi Aidoo, président du conseil d’administration d’Osiwa et directeur exécutif de Trust Africa.

La lutte devra non seulement impliquer les acteurs nationaux et sous-régionaux mais elle doit également se faire en étroite collaboration avec les pays destinataires de ces flux.  Les experts proposent aux gouvernements africains d’améliorer la bonne gouvernance économique grâce à plus de transparence, de renforcer la capacité des médias et celle de la société civile.

 L’argent qui quitte l’Afrique plus important que celui qui y entre

Selon le directeur management du Global financial integrity (Gfi), Tom Cardamone Les flux qui partent du continent sont plus importants que ceux qui y entrent ». Une étude récente menée par Gfi a démontré que les économies africaines ont perdu entre 597 millions de dollars (plus de 281,7 milliards de FCfa) et 1,4 milliard de dollars (plus de 672 milliards de FCfa) en transferts nets de ressources durant les trois dernières décennies, malgré la multiplication des institutions de promotion de la bonne gouvernance sur le continent. « Le résultat de ce rapport est qu’aujourd’hui, il a été constaté que 1,4 milliard de dollars quittent le continent africain de façon tout à fait illicite», a-t-il dit.

Le Sénégal moins touché par le fléau

Contrairement au Nigéria, l’Afrique du Sud ou l’Algérie,  le Sénégal est très loin du top 20 des pays les plus touchés par la fuite des capitaux vers l’étranger. Tom Cardamone de Global finacial integrity l’a révélé lors de son exposé, le 17/12/13, à Dakar, sur la fuite des capitaux. « Le Sénégal fait partie des pays qui ont le moins de flux illicites durant ces dix dernières années », dit-il.

Pour le président de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif), Waly Ndour, cela prouve que les dispositions prises par l’Etat du Sénégal pour lutter contre ce phénomène commencent à donner des résultats positifs. Toutefois, il prône la vigilance car les 20 pays qui ont été les plus touchés disposent de ressources naturelles. « Cela ne signifie pas que nous sommes épargnés. On a remarqué que les plus concernés disposent de plus de ressources naturelles et, peut-être, c’est ce qui explique leur position.

 Mais les flux partent également du Sénégal vers le reste du monde comme c’est le cas de tous les autres pays africains », prévient-il.  Des propos qui corroborent ceux du représentant du ministre de l’Economie et des Finances. Ousmane Kâ soutient qu’il est impératif que les acteurs africains prennent en main la lutte contre les flux financiers illicites. Selon lui, les gouvernements et les citoyens doivent faire preuve d’un leadership affirmé et assumé, pour plus de transparence et de redevabilité, en créant un environnement légal contraignant.

(Avec Absa Ndong)