Comment la Suisse attire les trafiquants de drogue africains

(Africa Diligence) Certaines nuits, le centre-ville de Lausanne ressemble à un immense marché de la drogue. Entre 100 et 150 de dealers balisent les places publiques, les entrées des bars et des boîtes de nuit. On y vend et achète de la cocaïne, de la marihuana et du haschisch. Une part du business est gérée par des dealers africains.

Le développement exponentiel de la vie nocturne lausannoise et la chute du prix de la cocaïne, et donc son usage «festif», sont à l’origine de l’explosion actuelle. Selon Olivier Gouaux, chef de la brigade des stupéfiants, Lausanne commencerait à être saturée. L’offre serait pléthorique et dépasserait la demande.

Les lieux du trafic sont connus. Les places Chauderon, de la Riponne, le Flon, Bel-Air, la gare CFF, la rue de Bourg et Saint-François balisent le territoire des affaires illicites. Les Africains de l’Ouest, ­notamment des Nigérians et des Guinéens, se partagent le commerce de la cocaïne et du cannabis. Ils stationnent aux coins des rues, dans des impasses ou dans les ­passages souterrains. Les Albanais éclusent de l’héroïne plus discrètement, dans des parcs publics périphériques.

L’arrivée importante de ressortissants d’Afrique du Nord, à la suite du Printemps arabe, a quelque peu modifié la donne. Ces ­derniers venus, responsables par ailleurs d’une recrudescence spectaculaire des vols, ont commencé à dealer à leur tour de l’héroïne sur la place de la Riponne, avec parfois des méthodes plus rudes. Des ­confrontations et des règlements de comptes ont même éclaté. Bon nombre de trafiquants de rue sont des requérants d’asile déboutés qui échappent au renvoi dans leur pays d’origine.

La police lausannoise est particulièrement performante dans son combat contre le trafic de stupéfiants. Les agents et les investigateurs ont procédé à 360 interpel­lations en 2012. En comparaison avec d’autres villes de Suisse, Lausanne enregistre 56,9 infractions à la loi sur les stupéfiants pour 1000 habitants, Berne 53,8, Zurich 30,3 et Genève 29,9. Ces chiffres sont l’indice de l’activité policière, car ces délits sont poursuivis sans dénonciation préalable.

Olivier Gouaux note enfin que Lausanne n’est pas une plaque tournante du commerce illégal des stupéfiants. «La traque dans la rue et le démantèlement des réseaux de grossistes, 16 en 2012, assurent une certaine maîtrise de la situation.» La capitale est, par contre, le terminal rêvé des marchands de drogue africains et non Africains.

(Avec Marco DANESI)