50% des entreprises utilisent le produit de leur veille

[Africa Diligence] Depuis plus de 30 ans, la plupart des grandes entreprises, à travers le monde, ont adopté l’intelligence économique, comme outil permettant d’accélérer la prise de bonnes décisions. Mais chaque fois qu’une entrepris opère ce choix, il en existe une autre qui néglige, à ses propres dépens, l’implication de la veille dans sa stratégie.

Nous avons récemment mené une enquête auprès des dirigeants et des analystes, afin d’évaluer à quel point leur apprentissage a influencé la prise d’importantes décisions dans leur entreprise, et pourquoi. Nous avons reçu des réponses de 21 industries aux USA et entreprises d’Europe, transmises par des analystes formés à la veille concurrentielle dans le cadre du marketing, de la recherche de clients, de la stratégie, de la R&D, de la finance et d’autres domaines. Ces responsables avaient en moyenne 6,3 années d’expérience dans l’utilisation du cadre et des outils de la veille concurrentielle. Par ailleurs, 62% d’entre eux étaient issus d’entreprises faisant des recettes annuelles supérieurs à 1 milliard de dollars, grâce aux ventes.

Nous avons découvert que 55% de nos répondants ont déclaré que leur apport dans les décisions managériales a fait suffisamment la différence dans l’amélioration de décisions. Toutefois, 45% d’entre eux ont affirmé que leur analyse de veille concurrentielle n’a pas eu cet impact. Pourquoi certains analystes ont-ils vu leur apport pris en compte, tandis que c’était le contraire pour d’autres ? Notre enquête a suggéré plusieurs réponses à cela.

Premièrement, plusieurs dirigeants prennent des décisions et, chemin faisant, ils décident d’utiliser la veille concurrentielle pour valider leur choix. A la question de savoir à quel pourcentage estimez-vous que vos rapports servent tout juste de ‘confirmation’ à un dirigeant qui a déjà pris sa décision ? », un gros tiers des interviewés a répondu « élevé » ou « très élevé ». Dans ces cas, l’analyse pourrait tout juste être une sorte de contrainte pouvant être rayée de liste.

Nous avons également développé des modèles de régression des OLS simples (méthodes classiques des moindres carrés) et testé plus de vingt-quatre variables afin de voir s’ils affectaient les entreprises qui ont effectivement permis à leurs analyses d’influencer leurs décisions. Comme résultat, nous avons trouvé que quatre variables s’étaient révélées hautement significatives dans l’explication de la différence d’impact.

  1. L’analyste avait reçu un pouvoir « d’approbation » de décisions majeures. Le moyen le plus efficace de s’assurer que la veille est mise en œuvre dans la moindre décision est d’accorder à l’analyste la possibilité de donner son avis sur des questions qui engagent l’avenir. Concrètement, cela signifie que l’analyste – pas simplement son beau PowerPoint – soit partie prenante des discussions devant conduire à la décision. C’est là le principal trait qui distingue les « organisations intelligentes » de la plupart parmi d’autres.
  2. La direction s’était ouverte aux perspectives qui étaient différentes du consensus interne. La direction qui était plus ouverte à divers points de vue était aussi plus susceptible de demander à l’analyste de lui présenter une « vue plus globale » de la situation et pas seulement les données.
  3. Le rapport de l’analyste appelait à être davantage proactif que réactif. La plupart des entreprises sont réactives dans leur nature, et l’essentiel de l’activité de veille consiste à réagir face aux mouvements des concurrents. Cependant, les décisions les plus déterminantes pourraient effectivement être celles qui relèvent de la surveillance. Lorsque l’analyste fournissait des recommandations de prévoyance, les analyses avaient alors plus d’impact.
  4. L’analyste était impliqué dans le lancement de produits. Nous ignorons pourquoi les analystes se sont révélés inefficaces dans ce domaine. En revanche, nous savons que la veille concurrentielle est extrêmement connue en matière de tactique et que le lancement de produits est un domaine où les entreprises s’inquiètent le plus des réactions de leurs concurrents. D’ailleurs, les lancements de produits dépendent d’une bonne évaluation des réactions des autres acteurs sur le marché. Cette opération inclut, naturellement, non seulement les consommateurs et les concurrents, mais aussi les réactions les moins évidentes des chaines de distribution, celles des autorités régulatrices et celles d’agents influents. Le manque d’anticipation intuitive de ces réactions – c’est là où la concurrence entre analystes demande l’expertise la plus élevée – conduit à plus d’échecs qu’il n’en faut. Peut-être les analystes impliqués dans le lancement de produits bénéficient-ils de plus de prérogatives que ceux qui travaillent dans d’autres domaines d’activités.

Aucune de ces phases n’exige de dépenser des millions sur la veille ou d’engager des légions d’analystes. Au-delà de tout, ces quatre variables ont révélé un taux acceptable de 40% de variabilité dans l’impact sur les décisions. En termes d’importance de l’effet, la simple exigence d’ « approbation » de la direction était clairement l’instrument majeur de l’explication de la variabilité de l’impact.

Dans le cadre de ces décisions, – celles qui ont été améliorées grâce à la veille concurrentielle – les analystes de la veille concurrentielle ont relevé que leur intuition s’est révélée exacte à plusieurs reprises. Alors que les lancements de projets étaient majoritaires, nos répondants nous ont parlé d’une grande diversité de domaines d’applications de leurs analyses. De façon égale, ils étaient partagés entre poursuivre des opportunité (46%) et réduire les risques (44%). De même, ils ont élargi la gamme de leurs activités jusqu’à la fixation du prix et la désignation des produits, au programme d’investissement, au processus de fabrication, à l’expansion du marché, à la coentreprise, au fusions-acquisitions et même davantage.

Par exemple, dans l’industrie pharmaceutique, les répondants ont affirmé que l’utilisation de la veille concurrentielle avait permis d’éviter la perte de millions ou d’en générer, grâce à l’arrêt du développement non productif de médicaments. Cette contribution a ainsi permis auxdites entreprises de se rétracter face à de mauvais engagements et/ou d’aventures devant conduire à l’échec, ou d’accélérer le développement de nouveaux médicaments sur la base des activités de concurrents. Par exemple, d’après l’un de nos répondants, « un programme d’orphelinat a été accéléré sur la base d’une prédiction avérée de l’entrée attendue d’une entreprise concurrente ».

Le sujet commun dans l’ensemble des industries portait sur la réaffectation des ressources. L’un des analystes nous a déclaré que leur entreprise avait interrompu le développement d’un projet qui consommait beaucoup de ressources locales, après que les analyses aient indiqué que ce projet ne serait pas viable. Après quoi, ils ont réaffecté ces ressources dans un domaine à fort potentiel de croissance – ce secteur d’activité est aujourd’hui en train de décoller. Dans une autre entreprise, une analyse a amené à annuler un programme de R&D extrêmement risqué.

Évoquer ces faits ne signifie pas vouloir discréditer l’importance de valider les méthodes appliquées actuellement. Un analyste a décrit la manière dont la veille concurrentielle avait « identifié un seul concurrent, tout en indiquant que les autres ne constituaient pas un problème de nature à poursuivre l’analyse ». Cependant, à la lumière de cette enquête, et de bien d’autres, que nous avons menées, il nous semble clair que les entreprises qui utilisent au mieux l’intelligence économique et stratégique, l’utilise dans une large gamme de possibilités – et ces compagnies permettent à la veille concurrentielle d’orienter leurs décisions.

Gilad et L. Fuld