SSII | Le comportement de l’entrepreneur tunisien en question

Comment améliorer la productivité de son entreprise ou comment produire plus avec les mêmes moyens ? Toujours est-il que cette même question se pose sur plus d’un front. Toujours est-il que cette même question intrigue tout un chacun quant à la meilleure façon de réaliser des gains de productivité au moment où, en Tunisie, cette même productivité reste en dessous des attentes et des aspirations. Néanmoins, dans un monde exacerbé par la globalisation, la maîtrise de l’information est l’un des éléments essentiels de la veille stratégique et économique, permettant aux entreprises d’avoir la capacité d’analyser en temps réel les impératifs de leur environnement. Dans cette ère de risque où il est difficile de maîtriser les risques et de les évaluer, les systèmes d’informations semblent être une parade pour améliorer la productivité d’une entreprise et de là assurer sa pérennité.

Par Walid Ahmed Ferchichi

Pour une Tunisie qui table sur un taux de croissance de 6%, l’amélioration de la productivité est placée au centre des préoccupations non seulement des autorités publiques mais également des entreprises tunisiennes d’autant plus que il est primordial de gagner le défi de la productivité en augmentant sa contribution à la croissance pour atteindre au moins 50%, dans les années à venir contre 43% actuellement. La Tunisie a toujours parié sur la compétitivité et l’amélioration de la productivité pour durcir sa moisson économique. Cependant, et malgré les efforts consentis en la matière, le pays demeure encore loin des standards de nos concurrents directs, surtout ceux de l’Europe.

Que l’on veuille ou pas, en Tunisie, on est en mal de productivité. C’est pénalisant en termes de compétitivité sur le marché international. Plusieurs facteurs concourent pour retarder sa progression. Le tissu économique en Tunisie est composé par 75% des PME dont la plupart sont des entreprises familiales et plus que 70% de ces entreprises n’arrivent pas à assurer leur survie jusqu’à la deuxième génération et 90% ne survivent pas jusqu’à la troisième génération. Il existe une confusion entre capital et gestion. La transparence des comptes fait toujours défaut. La gestion financière et la politique de l’investissement restent prudentes. Sans dramatiser, il n’en demeure pas moins qu’il existe des marges importantes qui poussent la Tunisie à s’atteler à atténuer les écarts et à améliorer ses moyennes en la matière.

Or, il est communément reconnu que l’amélioration de la productivité implique la mise en place des systèmes de veille économique, technologique et concurrentielle. Cependant, la trame économique en Tunisie, formée en grande partie par des PME, ne permet pas aux entreprises tunisiennes de se doter des mécanismes nécessaires, faute de moyens ou de volonté, pour intégrer ces systèmes dans leurs procédures organisationnelles, sans parler de la modernisation de la technologie, la diversification des structures de production à travers l’intégration des systèmes d’information comme un outil décisionnel.

Sans doute aucun, l’amélioration de la productivité en intégrant les systèmes d’informations est une démarche volontariste. Si l’Etat a choisi de bâtir la société du savoir en investissant dans les Systèmes d’Informations et Intelligence Economique, en multipliant les réformes structurelles ainsi que qualitatives de l’enseignement supérieur et en renforçant la coopération internationale en la matière, une frange importante des sociétés tunisiennes continue à considérer les SI comme un gadget de luxe. Alors même que le Président de la République vient de décider d’élever la part de la recherche scientifique et technologique dans le PIB de 1,25 à 1,5% à échéance 2014 et de consacrer 1% du chiffre d’affaires des grandes entreprises à la recherche scientifique et au développement technologique, certaines entreprises continuent à pratiquer une politique d’Autruche vis-à-vis de l’intégration des SI dans leurs politiques, stratégies et opérations.

On se rappelle bien, que sous l’initiative d’IC Informatique, le cabinet de consultants spécialisés en Système d’ Information et intégrateur de solutions E-management, tout un workshop a été dédié à la question cherchant à nous éclairer sur les enjeux des systèmes d’information dans l’amélioration de la productivité. A entendre les différents intervenants et conférenciers, une entreprise qui intègre la technologie, notamment les systèmes d’information dans la gestion de sa production, peut gagner jusqu’à 6% en termes de productivité.

Qui plus est, les systèmes d’information font une partie intégrante de la productivité organisationnelle, c’est-à-dire la productivité issue des changements de mode de production et d’approvisionnements (supply chain) ainsi qu’au niveau du management de la qualité, l’un des piliers de la compétitivité structurelle. Dans cette même veine, la gestion de production, les systèmes de management de la qualité, de la gestion de la maintenance et le pilotage de la relation client sont les principaux piliers de l’optimisation de la productivité. Une optimisation qui implique davantage le recours à une nouvelle réflexion qui trouve son saint Graal dans les systèmes d’informations.

Comme l’a précisé Lobna Jeribi Baccouche, expert en Systèmes d’information, lors du workshop, les technologies, à elles seules, ne suffisent pas. La plus grande difficulté est de changer le comportement des entrepreneurs tunisiens vers un projet global d’amélioration de la performance des entreprises. Pour que les SI soient la carte d’atout de la stratégie d’entreprise, il convient de rebâtir, et ce depuis les fondamentaux, ses principes de fonctionnement puis de préciser son rôle, voire sa mission au sein de l’organisation et de ses partenaires. Le premier sujet venant à l’esprit n’est autre que celui de la nécessaire croyance, de la part des entrepreneurs tunisiens, que l’amélioration de la productivité nécessite une bonne connaissance de l’environnement actuel et futur de l’entreprise et qu’elle passe obligatoirement aussi par la mise en place d’un système d’information capable de suivre, en temps réel, les indicateurs de performance et de pouvoir identifier les axes d’amélioration possibles.

Une chose est sûre. Pour remédier aux écarts de la productivité à l’échelle macro et micro économique, la gouvernance des technologies de l’information s’impose aujourd’hui comme une partie intégrante de la gouvernance d’entreprise. C’est en se plaçant sous cet angle que les acteurs privés ont tout intérêt à optimiser la valeur ajoutée des SI en s’assurant de l’alignement stratégique des technologies de l’information, de la bonne gestion des ressources et de la mesure des performances, une condition nécessaire pour la continuité et le développement des stratégies et objectifs de l’entreprise.