Afrique | Les dictatures à l’assaut d’Internet

Après la révolution égyptienne, des documents sensibles des services secrets de Moubarak révèlent comment Facebook, Hotmail, Gmail, Yahoo ! et compagnie devaient être espionnés grâce à une société allemande. Découverte quasi similaire à Tunis où les Services de Ben Ali profitaient du fournisseur d’accès à l’Internet national pour injecter un code JavaScript à chaque connexion provenant d’un utilisateur tunisien. Internet, ennemi public n°1 des dictatures ?

En Egypte, il semble qu’une société Allemande, Gamma group (filiale Siemens, Elaman), avait proposé son savoir-faire et ses logiciels pour permettre l’espionnage des ordinateurs et services webmail comme Gmail, Hotmail, Yahoo, mais aussi le service de VOiP Skype. Des factures ont été retrouvées pour l’achat, par exemple, de l’outil Finfisher. Prix de l’outillage de web espion : 287.137 euros. Une page Facebook a été montée par les Wikileakeurs égyptiens pour dénoncer cet espionnage.

Des actes qui n’étonnent pas, côté tunisien. Pour retrouver les meneurs des manifestations numériques, le gouvernement de Ben-Ali sniffait (interceptait) les identifiants de connexion à Facebook, Hotmail… etc. L’Etat tunisien utilisait, pour cela, le fournisseur d’accès à l’Internet national (ATI – Agence tunisienne d’Internet) pour injecter un code JavaScript à chaque connexion provenant d’un internaute tunisien (via un IP local, NDR). Mission : récupérer le login et le mot de passe des utilisateurs tunisiens de Facebook, mais aussi de Gmail et Yahoo !. Une méthode pour remonter une éventuelle trace appartenant aux Anonymous qui attaquaient les sites gouvernementaux, et avaient mis en place un espace de contestation à l’encontre de Tunis sur le portail communautaire américain. Dans le code source s’affichait l’url facebook.com/wo0dh3ad, avec comme commande l’interception du login et du mot de passe. Bien entendu, wo0dh3ad était un faux espace dédié aux Anonymous.

Pour Yahoo, l’url exploité était login.yahoo.com/wo0dh3ad ; pour Gmail google.com/wo0dh3ad?q. A noter qu’ATI n’est pas à son premier « filtre ». En avril 2010, il avait déjà bloqué Vimeo, Flickr ou encore Youtube. Cette méthode était exploitée depuis plusieurs mois par le gouvernement tunisien. Comme l’indiquait, en juillet 2010, Slim Amamou de Voices Advocacy, ATI forçait les Tunisiens à passer par du HTTP en interdisant l’utilisation du HTTPS, bloquant du même coup le chiffrement des informations pouvant transiter sur le web du pays (message, mot de passe, etc.).

Ces exemples, et bien d’autres, montrent qu’Internet est tout simplement devenu l’ennemi public n°1 des dictatures, ce qui ne les empêche absolument pas de tomber, poussées par les peuples.