L’Afrique pressée par les projets économiques et industriels régionaux

[Africa Diligence] Publiée en septembre 2014, une note de Knowdys Consulting Group intitulée « Industrialisation : l’Afrique sous embargo » décryptait les principaux freins aux industries africaines. Le propos de Mamadou Diallo, ci-après, réactive l’appel du leader africain du conseil en intelligence économique.

LE PROPOS DE MAMADOU DIALLO

Les données montrent que les mesures de libéralisation déjà mises en œuvre ont ramené la part de l’industrie manufacturière dans le PIB de l’Afrique de 15 % en 1990 à 10,6 % en 2015. Pendant des décennies, l’Afrique a laissé passer des possibilités d’industrialisation, de diversification de son économie et d’élimination de la pauvreté par la création d’emplois décents. Par exemple, toutes les régions africaines souffrent d’un déficit alimentaire, sauf celle de la Communauté d’Afrique de l’Est qui a continué de protéger le secteur agroalimentaire par des droits de douane élevés et d’autres mesures permettant au marché de se développer.

Rejeter les accords de partenariat avec l’UE

Actuellement, les politiques commerciales et industrielles des pays africains sont déterminées par les objectifs nationaux. Les responsables africains devraient corriger cette situation en lançant des initiatives industrielles régionales, encourageant les interactions avec les secteurs économiques régionaux. Dans ce but, les gouvernements africains devraient rejeter les accords de partenariat économique avec l’UE, comme le préconisent les syndicats, de façon à préserver leur marge d’action. Les syndicats leur conseillent également d’imposer d’ambitieuses obligations d’évaluation et de résultats à tous les investissements, y compris chinois.

Eviter le danger d’une zone sans frontière

Les négociations qui ont mené à l’Accord de libre-échange continental ouvrent la voie à l’établissement d’une Union douanière continentale d’ici 2022, et à la création d’une Communauté économique africaine d’ici 2028. Nous encourageons ces initiatives, mais tenons également à souligner qu’aucune véritable évaluation d’impact n’a été réalisée sur différents aspects du développement, comme les revenus des travailleurs, l’environnement et l’industrialisation. Les gouvernements africains n’ont pas consulté les syndicats, les défenseurs des droits des femmes, les organisations environnementales ou les autres acteurs de la société civile. Il existe aussi le danger que l’Accord crée une zone sans frontière favorisant la circulation de produits non africains.

Conserver les données personnelles africaines en Afrique

Les pays africains devraient lancer une initiative de grande ampleur pour électrifier les territoires, construire des infrastructures numériques et conserver les données personnelles africaines en Afrique, afin de conférer un avantage aux start-up et entreprises locales. Les connexions avec le reste du monde ne devraient être approuvées qu’après une réflexion approfondie.

Mamadou Diallo

Le Sénégalais Mamadou Diallo est Secrétaire général adjoint de la Confédération syndicale internationale (CSI). Il commence son activisme syndical en 1981, en tant qu’élève professeur. Après avoir été Secrétaire national chargé des jeunes puis Chargé de l’éducation et de la formation, il devient Secrétaire général du syndicat des professeurs du Sénégal en 1995. L’année suivante, il est élu Secrétaire confédéral chargé de l’administration de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) avant de devenir, en 1999, Secrétaire confédéral chargé de l’éducation et de la formation et Directeur de l’Institut national de formation ouvrière (INEFO) de la Centrale. Il rejoint la CISL à Bruxelles en 2003 comme Chef de l’Unité de la coopération syndicale au développement et à l’éducation. Avec la création de la CSI, il est tour à tour Chargé de coopération syndicale au développement et à l’éducation, Coordonnateur régional Afrique et Directeur du Département des droits humains et syndicaux. Il est élu Secrétaire général adjoint de la CSI fin 2017.