Pourquoi et comment le nombre de pays pauvres diminue en Afrique

(Africa Diligence) Le nombre de « pays les moins avancés » (PMA) – 49 actuellement – commence à baisser, selon les Nations Unies. Au moins six pays vont encore quitter les rangs des PMA d’ici à 2015. Une tendance soutenue par les investissements directs étrangers qui ont bondi de 20% en 2012, surtout en Afrique subsaharienne.

Au cours des quarante dernières années, le nombre de « pays les moins avancés » (PMA) a doublé : ils sont actuellement 49, contre 24 en 1971. Tous appartiennent au groupe peu envié des nations les plus pauvres du monde, caractérisées par une extrême précarité et des faiblesses économiques structurelles.

Mais leur nombre commence à se réduire, selon les Nations unies.

Jusqu’à présent, seules trois nations sont « passées » du statut de PMA à celui de pays en développement :

  • le Botswana en 1994,
  • le Cap-Vert en 2007,
  • les Maldives en 2011.

Et comme les économies s’améliorent, au moins six autres – Tuvalu, Vanuatu, Kiribati, Angola, Samoa et Guinée équatoriale – sont sur le point de quitter les rangs des PMA d’ici à 2015. Et ce, même si certains d’entre eux se sont montrés réticents à évoluer, le statut de PMA offrant plusieurs avantages, comme des tarifs préférentiels sur les exportations et une augmentation de l’aide au développement.

Selon le rapport mondial 2013 sur les investissements publié fin juin par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) basée à Genève, cette tendance est largement soutenue par les flux des investissements directs étrangers (IDE) vers les PMA : ils ont augmenté de 20% en 2012, enregistrant un record de 26 milliards de dollars.

Les plus gros gains ont été obtenus par le Cambodge, ainsi que par cinq pays africains : la République démocratique du Congo (RDC), le Liberia, la Mauritanie, le Mozambique et l’Ouganda, tous des PMA.

Toutefois, 20 PMA ont enregistré des baisses des IDE. Une désaffection particulièrement marquée en Angola, au Burundi, au Mali et dans les îles Salomon.

Une répartition plus équitable des ressources

Maintenant, cette tendance, qui apparaît comme une évolution positive de prime abord, pose plusieurs questions.

Est-elle tout d’abord pérenne ? Pas si sûr, selon Arjun Karki, coordonnateur international de LDC Watch, une alliance mondiale de la société civile focalisée sur les questions de développement et les préoccupations des PMA.

« Ce sont surtout les PMA riches en ressources naturelles, tels que la République démocratique du Congo et l’Ouganda, qui reçoivent des flux d’IDE. Or, du point de vue du développement, cette focalisation n’est pas très encourageante : elle renforce une croissance basée uniquement sur les matières premières des PMA, qui ne sont pas durables. »

Ce qui pose également la question de la redistribution des richesses. Et là aussi les IDE sont mal orientés, d’après Arjun Karki.

« Ces flux de capitaux étrangers ciblent surtout les industries extractives, et ne profitent donc qu’à une minorité de la population : seules les sociétés multinationales et transnationales, ainsi que les élites du pays bénéficiaire, ramassent l’argent à la pelle.

Lors de mes récents voyages au Ghana et au Liberia, plusieurs partenaires de la société civile étaient d’avis que toutes ces richesses devraient rester dans le sol puisqu’elles ne parviennent pas à assurer le droit au développement durable des peuples. »

Pour réduire les inégalités et assurer une répartition équitable des ressources, les investissements étrangers devraient, selon lui, viser plutôt des secteurs clés pour les populations : la fabrication, les infrastructures, les services de base tels que la santé, l’eau et l’assainissement, l’électricité et les communications.

Mais loin de voir cette avancée en trompe-l’œil, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, estime que cette augmentation des IDE arrive à « un moment important », où la communauté internationale mène une dernière campagne pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), d’ici à la date butoir de 2015.

L’un des premiers objectifs est d’éliminer l’extrême pauvreté et la faim. Soit deux des principaux problèmes auxquels la plupart des PMA sont confrontés.

Et comme ils ne seront certainement pas éradiqués d’ici à deux ans, les Nations unies travaillent à forger une vision pour l’agenda de développement post-2015, a précisé Ban Ki-moon. Dans cette perspective, « avoir des informations crédibles et objectives sur les IDE peut contribuer au succès de ces efforts qui vont de pair ».

Thalif DEEN