Tchad : investir avec succès dans une économie de guerre

[Africa Diligence] Depuis 1965, avec une révolte contre le régime de François Tombalbaye, le Tchad n’a jamais connu la paix totale. D’où son installation dans une économie de guerre qui a ses adeptes. Alors qu’il mène des réformes courageuses en interne et une guerre asymétrique à l’extérieur, le Président Idriss Déby doit trouver des investisseurs – autres que Chinois – et ailleurs que dans le secteur pétrolier. Une gageure ?

Les conseils en intelligence économique de Knowdys Consulting Group n’ont jamais eu de cesse d’affirmer que « N’Djamena investit à perte dans les publireportages des magazines internationaux. » Les anciennes approches de communication ne fonctionnent que « pour l’égo des dirigeants, estime un consultant de la firme de conseil, mais pas vraiment pour le public qui devine lorsqu’on paye un journal pour vendre une personnalité ou une destination ».

Aucun investisseur n’ignore les difficultés du Tchad, et aucun magazine ne peut les maquiller à la faveur d’un numéro spécial. « Les opérateurs économiques sont prêts à faire des choix inattendus lorsqu’on leur dit la vérité », estime-t-on chez Knowdys. N’Djamena doit donc jouer franc jeu avec les investisseurs qui n’ignorent pas, à titre d’exemple, que le pays accueille 85 000 réfugiés de la crise centrafricaine. Même sous le couvert du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), ces personnes sinistrées ne doivent-elles pas être nourries, soignées et logées ? D’où viennent les biens et les services pour répondre à ces besoins ?

Investir dans l’économie tchadienne, c’est oser le pari de Deloitte en surfant sur l’amélioration du climat des affaires, la construction des infrastructures, l’exploitation pétrolière et la gestion des risques y afférents. Oser le Tchad, « c’est, explique ce consultant de Knowdys, bien comprendre que les gros dossiers sont traités à la Présidence de la république, et que cette situation a relégué plusieurs ministres au rang d’exécutants des décisions venues du Palais ».

De plus, les nombreuses années de guerre qu’a connues le pays ont une très forte influence sur la manière de faire affaire avec les étrangers. D’après les analystes de Knowdys, ce contexte rend la prévention et la gestion des risques interculturels vitales pour les opérateurs économiques désireux de se réussir au Tchad. « C’est, avant les relations avec l’entourage du Président, la première barrière à traverser dans ce pays qui, on ne le dit pas haut, est l’un des plus rentables au monde. » Reste à être accompagné par des professionnels aguerris et reconnus.

Les dirigeants de China National Petroleum Corporation (CNPC) l’ont appris à leurs dépens, il y a quelques mois. Ils ont cru qu’il suffisait d’avoir signé des accords. L’amende reçue par CNPC pour violation de normes environnementales a tendu les relations entre Pékin et N’Djamena du fait d’un « mépris apparent des opérateurs chinois », relate une source proche du Palais. Cette tension a eu comme conséquence, parmi d’autres, l’accélération du dossier d’implantation de Glencore, la multinationale qui attendait patiemment au pas de la porte…

La Rédaction